Sécheresse 2011, capitalisons nos expériences.

Une enquête régionale sur les dérobées.

Les années se suivent et ne se ressemblent pas, mais face à la sécheresse du printemps 2011, de nombreux agriculteurs ont implanté après une culture principale des cultures fourragères en dérobé (Moha, Millet, Sorgho, RGI, ..). Pour mieux apprécier les rendements obtenus et les difficultés rencontrées pour l’implantation et la récolte de ces cultures, un enquête régionale, via les sites internet PEP Bovins lait et FIDOCL a permis aux agriculteurs de nous faire partager  leurs expériences.

75 agriculteurs se sont exprimés. 80% d’entre eux sont des éleveurs bovins lait. Quelques éleveurs bovins viande et caprin ainsi que des céréaliers ont aussi participé. La majorité (90%) des réponses proviennent de la région Rhône-Alpes majoritairement des départements de l’Isère, Rhône, Loire et Ain en zone de plaine et coteaux. Quelques agriculteurs de l’ouest ou du nord de la France complètent l’échantillon. Carte des réponses.

Lire le questionnaire.

Objectif prioritaire: combler le déficit fourrager du printemps.

Les premières récoltes du printemps 2011 en herbe étaient inférieures de 30 à 50% d’une année normale en prairies temporaires et naturelles. Les semis de maïs dans le  sec ont eu du mal à se développer normalement en mai et juin. Face au déficit fourrager du printemps et la crainte de l’été, les agriculteurs  ont massivement semé des dérobés.

La motivation principale était de combler ce déficit (64% des réponses). Ainsi les espèces semées visaient à fournir assez rapidement des quantités importantes de fourrages à récolter dés l’été et l’automne.

 Pour d’autres agriculteurs (16%) la priorité était d’avoir du fourrage à pâturer en fin d’été pour limiter le recours aux stocks. Ces éleveurs ont alors semé des crucifères ou du moha..

Enfin dans les zones les plus séchantes, les agriculteurs ont semé principalement des sorghos en remplacement de maïs ou bien ont attendu l’automne pour implanter des mélanges céréaliers ou du RGI à récolter en 2012.

Une grande variété de couverts implantés...

La culture implantée en 2011 était nouvelle pour un agriculteur sur deux ce qui montre la faible expérience « des dérobées ».

Ces couverts concernent en moyenne 7ha (de 1 à 30ha !) pour une SAU 101 ha. La proportion est donc assez importante et reflète le manque important de fourrages au printemps dernier.

Les cultures les plus citées concernent le sorgho, les mélanges graminées-légumineuses, les ray-grass d’Italie et le moha. Les cultures dites nouvelles étaient le plus souvent les sorghos, moha et mélanges.

..selon les objectifs poursuivis.

Souvent la disponibilité en graines et l’expérience antérieure des agriculteurs ont guidé le choix des espèces semées.

Les éleveurs recherchant des fourrages à pâturer ou pour l’affouragement en vert ont privilégié les cultures « classiques » ray gras d’Italie, colza et choux fourrager. Quelques parcelles de millet et sorgho fourrager ont aussi été pâturées.

Les parcelles semées en moha, en pur ou associé avec du trèfle d’alexandrie ont été récoltées de préférence en foin.

Les ensilages ont principalement concerné les surfaces en sorgho.

Enfin le mode principal de récolte des dérobés est l’enrubannage et concerne tout type de couverts.

Témoignage:

« Mon fournisseur me proposait plusieurs espèces assez nouvelles pour moi. Au final j’ai semé un mélange de moha-trèfle alexandrie pour essayer et j’ai privilégié la sécurité avec une parcelle ray grass Italie-trèfle violet. Les deux récoltés en enrubannage ont donné satisfaction. »

 

L'occasion aussi de faire des essais.

Le retour des enquêtes montre aussi la diversité des associations testées.

Témoignages:

Eleveur Isère: « j’ai semé le 15 juin un mélange de 5 kg de moha, 4 kg millet et 10 kg de trèfle d’alexandrie. J’ai récolté en ensilage le 25/8 environ 4 tonnes de matière sèche. A l’automne j’ai pu faire pâturer deux fois la parcelle. En associant aussi du ray-grass 6 mois au mélange les repousses d’automne auraient pu être plus importantes »

Eleveur Rhône: « j’ai semé 4 hectares d’un mélange sorgho/trèfle d’alexandrie à la mi-juillet. A la mi-octobre et pendant 1 mois les génisses ont bien pâturé la parcelle (rendement estimé à 2t ms/ha). Un voisin a associé du ray-grass d’Italie à un sorgho piper. En deux mois il a pu aussi récolter 2 tonnes de MS/ha. »

 

 


 

 

 

 

 

 

Des semis étalés de juin à août...

Selon les zones, les orages et le niveau de sécheresse, les dates de semis sont très variables.

Les premiers semis de dérobés ont commencé début juin derrière ray-grass ou derrière les premières céréales récoltées précocement. Sorgho et millet ont ainsi été implantés en juin voir jusqu’à fin juillet.

 Les moha et associations graminées-légumineuses ont été semés dans le sec de mi-juin à fin juillet et ont profité des pluies d’orage.

A partir de la mi-juillet, le ray grass italien a pris le relais pour des semis jusqu’à septembre.

Enfin les choux et colza fourrager ont été semés en août.

...de préférence avec un travail superficiel du sol.

Près de 80% des semis ont eu lieu derrière céréales à paille battues ou ensilées. Une parcelle sur 5 était irriguée.

Les 3/4 des semis ont été effectués sans labour avec un travail superficiel du sol.

Témoignage:

« j’ai semé un mélange graminées-légumineuses début juillet comme une prairie temporaire : lisier + déchaumeur + semis combiné + rouleau. Les pluies qui ont suivi ont permis une levée impeccable en 5 jours »

 

Témoignages:

« Ne pas se précipiter pour le semis, faire un à deux faux semis, ou faire un labour »

« Même si on est jamais sûr de la météo de l’été,  il faut se donner le maximum de chance de réussir l’implantation. Après ...»

« Sur certaines parcelles de sorgho, j’ai fait l’impasse d’un désherbage précoce. Le salissement important a pénalisé le rendement. »

« Bonne réussite à l’implantation avec un mois de juillet pluvieux. Mais le RGI a souffert fin août des fortes chaleurs »

« Les repousses de RGI au printemps prochain pourront m’assurer un pâturage précoce début avril »

Se donner les moyens de réussir.

Le niveau de fertilisation des cultures semées est plutôt faible et très variable.

Les associations et mélanges ont été le moins fertilisés du fait de l’introduction de légumineuses (0 à 60 unités d’azote).

30 à 60 unités ont été apportées au ray-grass souvent en complément de lisier.

40 à 100 unités d’azote pour les sorghos avec souvent des apports complémentaires de matière organique.

Le désherbage chimique est très rare et ne concerne que les sorghos (1 parcelle sur 4) malgré des problèmes assez fréquents de salissement de parcelle.

Des rendements très hétérogènes.

Le rendement moyen de tous les fourrages observés par cette enquête est de 3.7 tonnes de MS/ha.

Les rendements les plushomogènes sont obtenus avec les RGI (2.5 à 4 tms/ha) récoltés majoritairement en enrubannage à partir du 15 septembre.

De même les rendements en moha sont assez homogènes et du même niveau (2 à 4 tms/ha) récolté en foin à partir de fin août pour les premiers semés ou en enrubannage fin septembre pour les derniers.

Les rendements les plus variables sont observés sur les sorghos. La vitesse d’implantation (et salissement) et la capacité ou non d’irrigation expliquent les différences de rendements (3 à 9 tms/ha). Récoltes de mi-septembre pour les plus précoces à la mi-octobre.

Enfin les parcelles de mélanges et associations ont aussi des rendements très hétérogènes de 2 à 7 tms/ha selon notamment la capacité ou non à exploiter les repousses après ensilage. Les pluies parfois fortes de l’été et la baisse de température ont pénalisé la levée des petites graines et limité la pousse d’espèces comme le moha ou trèfle.

 

Témoignages:

« mélange moha, millet trèfle semé mi-juin : 2 paturages de génisses ont été réalisés après l'ensilage »

« Sorgho bmr semé début juillet : tendance à verser, récolté au Kemper le 20 septembre. Bonne ingestion par les vaches laitières »

« Moha semé mi-juillet récolté en foin mi-septembre : donné aux génisses tout l'hiver pas de problème de croissance »

« Mélange triticale-pois semé mi-juillet récolté fin septembre en enrubannage (3 tms/ha) : difficile à mélanger dans la machine, demande un maximum de puissance »

Du fourrage grossier avant tout.

Les fourrages quelque soit leur mode de récolte ont été destinés en priorité (2/3) au génisses, broutards et vaches allaitantes.

Les vaches laitières ont de préférence utilisé les meilleurs fourrages : RGI, sorghos pas trop humides et colzas fourragers.

 

 

 

 

Et si c'était à refaire

 

Quelque soit les dérobés les avis sont partagés sur l’appréciation de la qualité des fourrages. Les principaux griefs sont : fourrages trop humides à la récolte, difficiles à sécher, des refus dans le cas des mélanges trop grossiers, des fourrages qui versent ou des pierres à la récolte sur les parcelles pas assez rappuyées.

La majorité des éleveurs (3/4) sont satisfaits de leurs dérobés. Mais au vu de leur expérience ils envisagent des améliorations  : désherber le sorgho, semer plus tôt dans le sec, rouler  après implantation, préfaner davantage avant d’enrubanner, préférer un mélange capable de repousser l’automne pour  pâturer, ne pas mettre tous ses œufs dans le même papier !

On le voit les possibilités existent, restent encore des questions en suspens à lever.

 

Avec la participation des éleveurs internautes et de leurs conseillers d'élevage, un grand merci à tous pour le partage de leurs expériences.

 

 

Avec les concours:

 

Jean Philippe Goron, PEP Bovin Lait, Isère Conseil Elevage.

Enquête dérobées 2011, capitalisons nos expériences. mai 2012

Télécharger les documents sur le site du PEP Bovin Lait.

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