Comment faire plus de lait avec la qualité moyenne des fourrages de cette année

Que ce soit les ensilages de maïs ou d'herbes, force est de constater qu'ils ne sont pas trés laitiers cette année. Les valeurs d'analyses moyens pour l'herbe, voir mauvais pour le maïs trouvent leur prolongement dans les quantités de lait produites sur le terrain. Au fur et à mesure que les silos s'ouvrent, le constat est le même : la production chute et les démarages en lactation sont en dessous des niveaux espérés. Deux questions reviennent alors souvent : Comment faire plus de lait? Et doit-on faire plus de lait?

 

Comment faire plus de lait avec ces fourrages ?

Le principal problème des fourrages de 2012 est leur manque de digestibilité. La qualité moyenne des fourrages doit conduire à les rationner quelque peu cette année, et parrallèlement pour la compenser il est nécessaire de remettre de la digestibilité dans la ration sous 3 formes : sucres solubles, amidon et hémicellulose.

Le manque de sucres solubles dans les rations 2012 est de 1 à 2%, soit 200 à 400g. Privilégiez les aliments purs (mélasse de betterave voir mélasse de canne). Par contre, les aliments liquides du commerces sont majoritairement constitués de protéines solubles, et d'assez peu de sucres solubles, ce qui fait que pour combler le manque de sucres solubles de la ration, la quantité nécessaire sera importante et onéreuse d'un point de vue économique.

Pour l'amidon, le manque dans les rations est d'environ 400 à 500g. Il faut privilégier cette année les céréales à paille (orge, blé, triticale) qui vont apporter des amidon rapidement dégradables. Attention cependant à ne pas dépasser 20% d'amidon par kg de Matiere Sèche.

Concernant l'hémicellulose, la pulpe de betteraves deshydratée reste le meilleur choix. En fonction des cours et opportunités d'achat, la coque de soja, la graine de coton, voir le corn gluteen feed (déhysdraté ou humide) peuvent être utilisés.

Pour des valeurs de fourrages standards de 2012 (0.86 UFL, 46 PDIN, 71 PDIE pour le maïs, et 0.78 UFL, 82 PDIN, 78 PDIE pour l'herbe), nous pouvons conseiller de limiter les fourrages aux alentours de 14 kg de Matière Séche (par exemple 8.5 Kg ensilage de maïs, 3.8 kg ensilage herbe, et 1.7 kg de foin) et reconcentrer ensuite avec au maximum 0.8 kg de mélasse, 0.7 kg d'orge et 1.5 kg de pulpes de betterave.

Ensuite on équilibre la ration en fonction du niveau souhaité en ajoutant des céréales (blé ou orge) et du correcteur azoté. Pour un objectif de produtcion de 28 kg (41 de TB et 33.5 de TP), il sera nécessaire d'ajouter 2 kg d'orge, 2 kg de tourteau de colza, et 1.5 kg de tourteau de soja. Associer le colza et le soja permet d'avoir des sources complémentaires de protéines, ce qui optimisera la digestibilité des fourrages. Eviter cette année les tourteaux de tournesol, qui s'équilibrera plus difficilement avec les fourrages, et si des drêches de blé sont utilisées, il sera nécessaire de les plafonner à 1 kg. D'autre part, si vous utilisez des correcteurs azotés du commerce, il faudra être vigilent sur 2 points car ils comportent des taux d'urée allant jusqu'à 3% cet hiver :

- les fourrages 2012 étant déja faibles en PDIE, l'urée risque d'accentuer ce déficit

- pour faire plus de lait, nous pouvons être tentés de dépasser les seuils de toxicité (cf article réalisé par l'Institut de l'élevage sur ce sujet)

Attention à ne pas dépasser les 3 kg de concentrés par repas pour ne pas etre en acidose. La fermentescibilité des fourrages de cette année étant moindre, les risques d'acidose sont moindre, et on peut par conséquent forcer un peu plus que d'habitude en concentrés. Surveiller l'aspect des bouses, entre autres critères, permettra d'être vigilent sur ce risque d'acidose.
 


Doit-on faire plus de lait ?

Compte tenu du faible potentiel des fourrages, et du fait qu'ils représentent les 3/4 de la ration, vouloir faire la même quantité de lait que l'an dernier est bien souvent anti-économique à court terme. En effet, on aura beau rajouter des concentrés en quantités, on ne pourra jamais compenser le manque de digestibilité et d'énergie des fourrages. Et dans le contexte actuel de prix élevé des aliments et de faible prix du lait, le plus économique est d'accepter le potentiel des fourrages et de se contenter de les équilibrer sans chercher à remonter leurs valeurs. Cela revient à adapter l'objectif de production en fonction de la valeur des fourrages présents.

Plusieurs points de vigilence doivent être néanmoins pris en compte :

- la préparation au vélage des vaches taries est d'autant plus importante cette année, car il faut préparer les rumens à être capable de digérer des fourrages moins digestibles. Pour cela il faut développer le volume du rumen (foin fibreux et trés apétent), développer les papilles minimum 1 mois avant le vélage (0.5 à 1 kg de céréales), et une flore adaptée au minimum 3 semaines avant le vélage (c'est à dire de l'ensilage de maïs si ce fourrage est distribué aprés vélage, avec la complémentation azotée adaptée)

- la nécessité de ne pas trop pénaliser la couverture énergétique en début de lactation afin de ne pas trop réduir l'état d'engraissement des vaches (et ne pas pénaliser leur reproduction)

- la couverture des besoins en azote qui doit être privilégié sur les débuts de lactation pour moins pénaliser la lactation totale. A adapter avec le potentiel de la ration pour ne pas créer de déficite énergétique sur les 2e et 3e mois aprés vélage.

 

D'autre part, certains éleveurs ont en point de mire les années références qui seront prises pour l'aprés-quota. Les contrats seront calqués sur les référence produites, et dans certains cas la campagne 2012/2013 sera prise en compte. Dans ce cas particulier, il peut être stratégiquement intéressant pour faire son quota de maximiser la production laitière pour le moyen terme, bien que ce ne soit pas économique à court terme.

Chaque situation est particulière, ainsi une expertise de votre situation réalisée par votre conseiller d'élevage vous permettra de déterminer la meilleure stratégie pour votre exploitation. N'hésitez pas à faire le point avec lui. Pour en savoir plus, retrouvez le témoignage de Cécile GRAND du GAEC du PINET à St Didier au Monts d'Or (69)

Anne BLONDEL et Patrice DUBOIS, FIDOCL Conseil Elevage

Voir aussi :

- Alimentation et Agriculture biologique 

 

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