Témoignage éleveur: Ensiler de la luzerne en complément du maïs ensilage

Ensiler de la luzerne en complément du maïs ensilage - Bruno ALBERT et sa femme, éleveurs au Mottier (38)

Exploitation individuelle, 400 000 litres de lait produits. 54 hectares, dont 12 à 15 ha de maïs ensilage, 9 ha de céréales grain dont la moitié autoconsommée, 12 ha de prairies temporaires et 18 ha de prairies naturelles.

Pour quelles raisons cultivez-vous de la luzerne ?

Il y a toujours eu de la luzerne dans l’assolement. Déjà les sols s’y prêtent bien (gravier profond) et permettent d’implanter une luzerne pour 4 ans. Pour moi c’est plus facile de conduire un troupeau avec une ration mixte maïs-luzerne que tout maïs. Cultiver de la luzerne c’est évidement plus de travail que le maïs ensilage mais avec la luzerne les vaches ruminent mieux et me semblent en meilleure santé. Je me facilite le travail au quotidien sur le troupeau. Je réserve la culture de la luzerne principalement aux surfaces du périmètre de captage qui limite les apports d’engrais. Malgré ces contraintes, je peux être autonome en fourrages. Enfin c’est sûr, apporter de la luzerne dans la ration c’est aussi une économie de correcteur azoté. L’an dernier j’ai eu des soucis d’implantation de mes luzernes (attaque de citone), j’ai semé en remplacement un mélange RGI-trèfle violet mais qui me satisfait beaucoup moins (difficile à sécher et récolter, moindre repousse l’été et pérennité inférieure). Du coup cette année j’ai encore augmenté mes surfaces en luzerne (6 ha).

La première coupe est systématiquement ensilée ?

La deuxième aussi si j’ai de la place dans les silos. Cette année j’ai ensilé autour du 10 mai les surfaces en luzerne et les prairies temporaires à base de ray-grass et trèfle violet, pour un rendement moyen proche des 4 tonnes de MS/ha. Cette année avec le printemps humide je n’ai pas pu préfaner suffisamment le fourrage. Les autres années, je fauche et l’entrepreneur vient ensiler 24 ou 48h après selon les conditions météorologiques. La matière sèche de l’ensilage se situe entre 30 à 35%. Il se conserve très bien à condition d’incorporer au silo un conservateur acide classique (1 arrosoir/remorque). Cette année j’ai voulu faire une économie de quelques arrosoirs sur les remorques du mélange RGI-trèfle. La conservation n’a pas été aussi bonne. Les autres coupes sont récoltées en balles rondes. De manière à perdre le moins de feuilles possibles, j’évite de faner la luzerne. Je me contente de la retourner avec un andaineur classique.  La dernière coupe mi-octobre est enrubannée. En 4 coupes j’arrive à un rendement proche des 10 à 12 tonnes de MS/ha/an.

Votre ration, mélange 1/4 luzerne, 3/4 maïs ensilage, vous donne-t-elle satisfaction ?

Chiffres clés de l'exploitation

Nombre de vaches :45 VL race holstein
Niveau étable :9 100 Litres / VL
Production hivernale moyenne :27kg litres lait
Ration hivernale :

35 kg ensilage maïs

10 kg ensilage herbe et 1.5 foin

1.5 kg tourteau de colza et 1.5 soja

1 kg céréale

coût alimentation :121 €/1000 litres
Coût concentrés :50 €/1000 litres

Tout à fait ! J’attaque mon silo d’herbe à partir de début août dés les premiers vêlages. La ration des laitières ne change quasiment pas jusqu’à la fin mars et la mise à l’herbe. En complément du maïs ensilage j’associe de l’herbe ensilée (luzerne, trèfle et graminée) et du foin de luzerne pour l’effet piquant. Je complémente par des matières premières (tourteau soja, colza et céréales aplaties). Avec la luzerne je pense économiser un demi-kilo de correcteur azoté par vache et par jour. Par simplification j’utilise la ration complète. Aucune complémentation individuelle. Je vois bien que certaines vaches souffrent. Pour la reproduction ça tire un peu. Mais globalement c’est satisfaisant. Les pics de lactation sont écrêtés et mes vaches tiennent très bien leur lactation.

Comment envisagez-vous de réduire encore vos achats de correcteurs azotés ?

L’an dernier j’ai acheté 25 tonnes d’un mélange drêches de brasserie-drêches de blé éthanol. Le produit est moins humide (40% MS) que la drêche de brasserie classique. J’ai été très content du résultat : bonne conservation, du lait, économie de correcteur azoté. Ce printemps j’ai renouvelé l’opération mais les résultats ont été moins concluants.

Je ne peux pas vraiment augmenter encore plus mes surfaces en luzerne. Je suis un peu juste en surfaces et en capacité de stockage de foin. Le maïs ensilage reste une garantie pour être autonome en fourrages. Sans changer fondamentalement mes rations je me pose la question d’introduire du soja dans mon assolement, en remplacement du blé. A raison de 1 à 2 kg de graine crue aplatie, je pourrais peut-être économiser l’achat de quelques tonnes de soja. Reste à maîtriser la culture et sa valorisation par les animaux.

 

 

Le regard de Patrice JOUSSE, conseiller d’élevage du secteur

"Les valeurs des ensilages de ce printemps sont inférieures à d’habitude. Malgré cela, la luzerne reste tout de même très intéressante, car elle permet encore d’économiser 0.5 Kg de correcteur type soja. De plus, en foin comme en ensilage, ce fourrage permet de sécuriser la ration en complément du maïs ensilage. Les vaches ruminent bien, les aliments apportés sont bien valorisés, et cela se ressent sur les performances et la santé des animaux."

 

Pour en savoir plus sur l'intérêt de la luzerne

Jean-Philippe GORON - Isère Conseil Elevage

 

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