La luzerne est de loin la plante fourragère qui produit le plus de protéines à l’hectare. Son intérêt cette année étant d'autant plus marquée qu'elle peut etre une alternative intéressante face à la forte hausse du marché des correcteurs azotés. La période idéale de semis étant le mois d'aout jusqu'à début septembre, et la qualité de son implantation étant primordiale pour optimiser sa production sur 3-4 ans, voici un rappel des principales préconisation nécessaire à la réussite de sa culture.
Une implantation à soigner
Choix de la parcelle
La luzerne exprime son potentiel seulement si son système racinaire est suffisamment profond et bien développée. Il convient de la réserver sur des parcelles saines et bien structurées. Les sols hydromorphes ou trop compact sont donc à éviter. Quelque soit le type de sol, le PH doit être proche de la neutralité, compris entre 6,5 et 7,2.
Privilégier un semis d'été
La luzerne doit atteindre le stade 2-3 feuilles trifoliée avant les 1ères gelées. Il est important pour cela de semer la luzerne courant août voir début septembre, tout en attendant un minimum d’humidité du sol avant d’engager un semis afin de faciliter la levée.
Privilégiez une levée dense (350 à 500 pieds levés à l’automne) et rapide afin de limiter les risques de salissement. Nous conseillons 20 à 25 kg/ha maximum de semences en pure et 18 à 20 kg/ha lorsque la luzerne est associée à une graminée (dactyle, fétuque).
Inoculation : rarement nécessaire !
Les bactéries Rhizobium qui vont fixer l’azote de l’air sont généralement présentes dans les sols calcaires à pH de 6.5 et plus, d’autant plus que la luzerne a déjà été cultivée sur la parcelle. L’inoculation ne doit donc etre envisagée uniquement dans les sols à tendance acide. Rappelons que le mélange semences inoculum doit être réalisé soigneusement, et le semis suivre dans la foulée, car les bactéries étant sensibles à la lumière.
Soigner le lit de semence
Le lit de semence doit être soigneusement préparé et bien tassé pour permettre un bon contact entre la graine et la terre. Les graines sont petites, et pas si faciles à réhumecter. Il faut donc semer peu profond (1 cm) et tasser après le semis.
Une parcelle propore en 1ere année d'exploitation
Les solutions agronomiques et phytosanitaires sont complémentaires pour assurer une bonne propreté de votre culture. Privilégiez le respect des normes agronomiques en préventif, puis si besoins en curatifs les solutions phytosanitaires :
- Au semis : réaliser si possible un faux semis pour faire levée les adventices.
- Technique de semis : on peut éviter le lignage (débrancher les descentes) pour mieux répartir la semence et limiter les risques de salissement.
- Entretien mécanique : réaliser une coupe précoce au printemps pour nettoyer la parcelle. Suivant le salissement, une fauche ou un broyage peut être nécessaire à l’automne.
- Les associations : permettent de limiter le développement des adventices et d’assurer un bonne 1ère coupe de fourrage (ensilage/enrubannage).
Semis d’automne | Semis de printemps |
5 à 7 kg de Trèfle d’Alexandrie ou de Perse 40 à 50 kg d’avoine d’hiver pour des semis tardifs | 40 à 50 kg d’avoine (récolte ensilage au stade grain laiteux) 40-60 kg d’orge de printemps (récolte grain de préférence) |
- Désherbage des jeunes semis. Il existe un créneau de 3 semaines pour désherber les dicotylédones dans une jeune luzerne, entre 3 feuilles vraies (trifoliées) et 6 feuilles vraies. Passé ce stade les résultats sont aléatoires et souvent décevants. Surveiller donc la levée de vos semis et intervenez tôt !
- Sur dicotylédones : Adiago SG 0,6 kg/ha ou Embutone 5 a 7 l/ha ou Basagran SG 0,8 kg/ha ou Lentagran WP à 2 kg/ha (intervenir tôt sur adventices jeunes et en conditions poussantes)
- Sur graminées : à partir de trois feuilles des repousses ou des adventices : Ogive à 0,4 l/ha ou Targa D+ à 0,4 l/ha. Contre les graminées, un désherbage hivernal peut être réalisé début novembre avec le Légurame.
Une culture gourmande
Surveiller les ravageurs
- Les limaces dévorent les jeunes plantules de luzerne. La surveillance est indispensable (mise en place de pièges) et l’intervention est nécessaire si on observe plus de 20 limaces/m2 (Mesurol Pro à 3 kg, ou Méthaldehyde à 5-10 kg). Si le temps au moment du semis est trop humide, on peut mélanger l’hellicide à la semence.
- Les sitones adultes consomment les feuilles. Les larves peuvent porter préjudice aux nodosités. Le traitement est conseillé en cas d’attaque mais reste peu efficace (infestation trop étalée). L’intervention est possible avec des produits à base de Lambdacyhalothrine (KARATE Xpress ou Zéon).
Fertilisation PK indispensable
- Phosphore – Potasse : à l’unité, la luzerne exporte 8 kg de P2O5 et 25 kg de K2O par tonne de matières sèches. La fertilisation Phospho-potassique est à raisonner en fonction des teneurs de votre sol et des fréquences d’apports d’engrais de ferme. Les apports sont à positionner juste avant le démarrage de la culture (fin hiver ou début printemps). La luzerne valorise bien les engrais de ferme à l’implantation.
- Magnésium : l’apport se justifie si le sol en est peu pourvu (moins de 50 mg de MgO échangeable).
- Souffre : Les exportations en soufre sont plus élevées par rapport aux autres plantes fourragères. L’apport de soufre (50 à 80 kg de SO3/ha) est préconisé sur les sols filtrants ou peu profonds ou après un hiver pluvieux.
- Oligo-élément : la luzerne est sensible aux carences en Bore, Cuivre et Molybdène.
Un choix important de variétés
Les critères de productivité sont les rendements en MS et la teneur en protéine. La dormance hivernale et la résistance aux maladies sont les 2 autres critères importants à prendre en compte. Pour la dormance, choisissez des variétés type flamand (nord) avec une note dormance comprise entre 4 et 5,5.
Sur les zones moins exposées au vent et au froid, l’indice de dormance pourra être relevé pour un démarrage plus précoce au printemps et une meilleure productivité à l’automne, mais attention à la sensibilité au froid.
La tolérance à la verticillose et aux nématodes est à prendre en compte car il n’existe pas de lutte chimique.
Variétés | Obtenteur | Année inscript | Vigueur | Résistance nématodes | Rdt Moyen | Teneur en MAT | Commentaires |
GALAXIE | Jouffray Drillaud | 2007 | 6 | 6,8 | 17,3 | 20,1 | Fort rendement et riche en protéines |
RACHEL | Caussade semence | 2002 | - | 4,6 | 16,7 | 20,5 | Riche en protéine et résistante au gel |
ALICIA | LG Semences | 2005 | - | 5,6 | 16,9 | 20,1 | Riche en protéines |
SALSA | Semence de France | 2006 | 5,9 | 7,3 | 17,1 | 19,7 | Résistante froid et nématodes riche en protéine |
ARTEMIS | Barenbrug | 2010 | 6,3 | 7,6 | 17,5 | 19,1 | Productive, précoce et une bonne résistance |
TIMBALE | Jouffray Drillaud | 2003 | - | 5,7 | 16,7 | 20 | Résistante au froid |
PRUNELLE | RAGT semence | 2006 | 6 | 6,7 | 16,8 | 19,5 | Productive et résistante |
ALPHA
| Barenbrug | 2003 | - | 6,6 | 17 | 19,5 | Forte productivité et résistante aux nématodes |
Les variétés hybrides (Hybriforce 2400 et Hybriforce 420) : Originaire des Etats Unis, et développées par une entreprise de semence française (Prays Semence), ces variétés bénéficient de l’effet hybridation. Elles sont notées plus productives et plus pérennes grace à leurs fortes ramifications, confirmé par un essai mené récemment dans la Vienne. Par contre, ces variétés riches en feuilles ont tendance à verser.
Les associations possible avec les luzerne
L’association d’une graminée à une luzerne permet de réduire les risques de salissement, de limiter les pertes de feuilles lors de la récolte en foin et d’assurer une meilleure conservation en ensilage. Par type de sol, voici les graminées les mieux adaptées à ces associations :
Sol | Mélange préconisé |
Sol séchant |
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Sol frais ou à bonne réserve utile |
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Michaël BONNAULT - Isère Conseil Elevage