Quels que soient la race, les rations ou l’objectif d’âge au vêlage, la croissance des génisses doit impérativement atteindre le seuil de 130cm de tour de poitrine à 6 mois pour optimiser l’avenir de la future laitière. Au cours de sa première période de vie, la jeune génisse doit passer de monogastrique à ruminant et développer tous les organes utiles pour sa carrière de productrice de lait.
Dans les premiers mois, les tissus osseux, nerveux puis musculaires ont les vitesses de croissance les plus importantes du corps, au contraire des tissus adipeux. Ainsi toute l'alimentation permet alors de développer la croissance de la génisse, et préparer la future laitière au mieux. Ensuite, à partir de 6 mois, les tissus adipeux se mettent en place et dès 12 mois ont la vitesse de croissance la plus soutenue. A partir de ce moment, tout excès alimentaire se traduit par l'engraissement de l'animal.
La phase lactée en 3 étapes
Si le poids à 6 mois détermine les performances de la future carrière laitière (cf tableau ci-contre), l'atteinte des 200 Kg à 6 mois est quant à elle fortement liée à la réussite de la phase lactée. Tout retard de croissance ne se rattrape pas ensuite, et empêchera d'atteindre les 200 kg! La plus grande rigueur est nécessaire au cours de cette phase lactée avec le suivi des points clefs suivants :
Le colostrum
Il protège plus efficacement le veau des infections s’il est trait et bu rapidement après la naissance. L’idéal est d’avoir une tétée de 2 litres dans les 4 heures suivant la naissance. Cela est possible en laissant le veau avec sa mère ou en trayant l’animal rapidement pour donner le colostrum au biberon. Le drenchage (ingestion forcée) est à réserver aux veaux qui ont souffert au vêlage et qui ont du mal à téter.
Pour leurs besoins de croissance, les génisses doivent ensuite rapidement consommer 1 Kg de matière sèche de lait par jour.
Poudre ou lait entier ?
Les 2 techniques sont efficaces si elles sont utilisées correctement. Le lait entier doit être distribué à 30°c minimum, non dilué avec de l’eau et contenir moins de 38 g de matière grasse. Le lait contenant des antibiotiques va détruire la flore microbienne du tube digestif, il est donc à proscrire. Le lait contenant des cellules peut aussi apporter des pathogènes entrainant des diarrhées.
Les laits reconstitués contenant du lait en poudre sont préférables aux « poudres sans lait ». Ils sont mieux adaptés à la physiologie digestive du pré-ruminant. Dans tous les cas, la température de l’eau, la concentration en poudre et le temps d’homogénéisation de la préparation doivent respecter les préconisations du fabricant. Trop ou pas assez de poudre mal diluée entraine des troubles digestifs.
L’hygiène et le nettoyage des biberons ou seaux sont également primordiaux pour éviter les contaminations par des pathogènes.
Le sevrage
Il doit se faire lorsque le veau est capable de consommer 2 kg d’aliments secs, principalement des concentrés qui peuvent apporter l’énergie indispensable pour poursuivre la croissance. Cet apport est progressif et en parallèle d’une diminution des repas lactés.
La quantité de lait distribuée se réduit sur 2à 3 semaines sans jamais diluer le lait avec de l’eau. Le plus facile est souvent de ne donner qu’un seul repas de lait par jour pendant cette période. Les concentrés du commerce ou fermiers (maïs grain entier ou céréales aplaties plus tourteaux…) conviennent tous. Le foin grossier ou de luzerne est à disposition en petite quantité mais renouvelé impérativement tous les jours pour garder son appétence. En effet le veau a tendance à jouer avec, à l'humidifier avec sa bave, le rendant très rapidement non appétant.
Chacune de ces 3 étapes doit se faire en respectant des temps de transition. Les veaux sont rapidement stressés lors d’un changement alimentaire, de bâtiment ou de lot. Il est préférable de ne pas associer une modification de l’alimentation et du logement en même temps (et ce n’est pas facile...)
Au sevrage, les veaux pèsent environ 100 kg, ils consomment du foin à volonté, 2 kg d’aliments concentrés (16- 18% MAT environ) avec des minéraux. L’eau potable est à disposition et facilement consommable.
De 3 à 6 mois
La ration complète est parfaitement adaptée aux exigences de l’élevage des génisses. Elle supprime la contrainte horaire (2 fois/j) et la complémentation individuelle de concentrés. Elle permet surtout une prise d'aliment plus régulière, en plus petites quantités et parfaitement équilibrée (énergie + azote + fibre+ minéraux).
Si le confort des veaux est respecté, avec une alimentation de ce type, l’objectif de 200 kg à 6 mois (130cm de tour de poitrine) est atteint facilement.
6 mois – à l’insémination
Il faut adapter la croissance pour éviter l’engraissement, tout en maintenant l’objectif de former un ruminant. Autour de 12 mois, les organes génitaux se forment. Une alimentation trop riche, et un GMQ de plus de 800g par jour sur cette période, pour rattraper un retard, sera source de dépôt de graisses dans la future mamelle et autour des ovaires. La fécondité peut être diminuée. Et le développement des cellules adipeuses dans la mamelle se fera au détriment des futures cellules sécrétrices de lait.
La qualité de structure de la ration est apportée par des fibres (paille, luzerne, foin grossier). L’apport de concentrés type VL20 est de 1,5 kg avec de la paille, à 1 kg avec du foin grossier ; voir moins avec du foin de séchage. Le pâturage est tout à fait compatible avec les impératifs techniques. En cas d’herbe jeune et de très bonne qualité, fournir un fourrage grossier à volonté.
Pendant cette période, les animaux possèdent une bonne capacité de régulation.
L’alimentation doit s’ajuster aux objectifs d’âge au vêlage. Dans tous les cas, les veaux doivent avoir atteint au préalable 130cm de tour de poitrine à 6 mois.
De l’IA au vêlage
Sur cette période l’objectif de croissance dépend de l’âge au vêlage. Les organes stratégiques sont maintenant formés, et sont peu ou moins sensibles au risque d’engraissement.
Pour les vêlages à 24 mois, le GMQ devra rester élevé, tout en respectant l’équilibre global de la ration (fibre, énergie, azote). Pour des vêlages à plus de 30 mois, les fourrages seuls suffisent. Le pâturage est toujours parfaitement adapté à cette période.
Durant toute leur croissance, les génisses doivent bénéficier de conditions de logement adaptées à leur âge en limitant la concurrence et les risques d’infection.
La longévité de leur carrière de vaches laitières dépend de tous ces facteurs.
Voir aussi l'impact de l'âge au vêlage des génisses sur leur future carrière laitière
et Critères de choix d'une stratégie d'âge au vélage
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Anne Blondel – 01 et 71 Conseil Elevage