Charges de mécanisation maîtrisées en élevage Bovins lait, témoignage d'Emeric Barbier, Earl de Bourbre à Burcin (38)

Se fixer des seuils maximum d'investissements, trouver des partenaires locaux pour partager les charges, investir au bon moment, jamais dans la précipitation...pour au final maîtriser au mieux les charges de mécanisation et trouver un bon compromis travail-rémunération... Tel sont les objectifs de l'EARL de la Bourbre, et ceci depuis plusieurs générations. Explications :

 

 

Pas branché ferraille

« Dans la famille, on n'est pas matériel : on a du mal à lâcher de l'argent pour du matériel. Mon père déjà n'achetait pas neuf, par contre il était strict sur le soin porté au matériel, le sien et celui acheté en copropriété avec un cousin ». Le matériel est rangé à l'abri, mais il n'y a pas de poste à souder sur l'exploitation :  «on graisse le matériel, mais je ne change pas les pneus et je ne démonte rien. Je ne suis pas bricoleur alors je préfère aller chez mon garagiste ».

 

Achat d'occasion

« Pour les tracteurs, j'ai toujours acheté de l'occasion : le 80 chevaux, 5 cylindres, avait 8500 heures à l'achat, il en a 14000 en  2015...J'ai beaucoup de vieux tracteurs, car je n'aime pas dételer  et je les entretiens plus facilement. Avec l'électronique, ça devient plus risqué donc j'achète des tracteurs de 900 à 1000 heures »...oui mais le tracteur de tête coûte cher sur toute les exploitations... « j'ai loué un tracteur une année, puis nous avons fait le pas en Cuma : nous avons acheté un tracteur neuf, 120 chx le premier, 130 le second. Prévu pour 600 heures annuelles, il en fait 850 désormais sur la Cuma. Au départ je m'étais engagé sur 220 heures. J'en ferai 150 en 2015 ».

 

En Cuma et à plusieurs,  performant à tous les coups

« je suis dans trois Cuma. Ca me permet d'avoir du matériel performant (charrue, covercrop, tonne à lisier de 10 000 litres, round baller et bien sûr tracteur de forte puissance)...Si le matériel n'est pas disponible pour faire un chantier, j'attends un jour, ce n'est pas un problème... Pour les ensilages, la Cuma a une 8 rangs achetée d'occasion pour 5 éleveurs, donc sans contrainte de temps. Pour la moisson, je fais récolter par entreprise. Pour le matériel en copropriété, on ne compte pas nos heures, on divise les investissements et les factures d'entretien par 3... »

 

Savoir attendre et saisir les opportunités

« je n'achète jamais dans la précipitation. J'ai eu une opportunité pour un 110 chx, avec fourche et cabine pour 51000 euros. Je l'ai saisie. Les 7 000 euros d'annuités générées vont s'ajouter au 5000 euros du bol acheté en 2014. C'est le maxi que je rembourse en matériel. Mon père ne dépassait pas 1400 euros par mois. Moi je suis monté à 1600-1700 € mais avec davantage de lait. Le bol est un bol dessileur, il ne mobilise donc qu'un seul tracteur pour l'alimentation.

 

Respecter des seuils maximum de remboursement

« Après mon installation en 2002, j'ai construit un bâtiment neuf logettes paillées raclées, bien ventilé (tôles et toiture ajourées). Je voulais faire un appentis mais j'ai attendu car le montant était trop important. Avec les annuités du bâtiment, j'ai encore été plus vigilant sur les dépenses matérielles. J'ai acheté par exemple un semoir Nodet à 700 € et une faneuse 4 toupies pour 500€. Pour la dessileuse, j'en faisais 4 par jour avec mes 50 vaches. Côté travail, je gagne du temps avec mon bol dessileur acheté à l'automne 2014 et avec le logement sous l'appentis des génisses qui ont quitté l'étable entravée, mais pour cela, j'ai attendu que mon prêt bâtiment soit en fin de remboursement. »

 

Une exploitation qui a bien évolué

« Mon père déjà préférait investir dans les bâtiments plutôt que dans le matériel : les silos avec mur bois sont très fonctionnels. Quand on est passé en bottes rondes, on a rapidement investi dans une griffe télescopique pour bien valoriser les vieux bâtiments Mon père est à la retraite depuis 2011. Il est associé non exploitant de l'earl. Il m'aide encore pas mal et il touche une rémunération de son capital chaque année. Je fais partie d'un groupement d'employeur. Le salarié fait 16 heures une semaine et 8 la suivante. En 2015, je vais produire 400 000 litres de lait sur 78 hectares. Mon père en faisait 115 000 en 1995, sur 40 ha... Pour embaucher, pour travailler en Cuma ou en copropriété, il faut déjà bien se connaître soi-même : savoir ce que l'on est prêt à accepter.

 

Performant économiquement

Sur les 6 dernières années, le coût moyen de la mécanisation est de 88 euros / 1000 litres seulement pour l'earl de Bourbre : 35 de travaux par tiers, 12 carburant, 16 entretien et pièces, 25 amortissement. A cette bonne maîtrise des charges de mécanisation, s'ajoute la productivité élevée d'Emeric Barbier (280 000 litres/UMO lait exploitant).  En cumulant charges de méca faibles, maîtrise des charges alimentaires (123 euros/1000l) et productivité du travail, Emeric Barbier dégage une bonne rémunération de sa main d'oeuvre : 2 Smic par UMO en moyenne sur les 6 ans !

 

Propos recuillis par Jean-Philippe GORON - Isère Conseil Elevage

 

Voir également les témoignages de l'exploitation n°3 GAEC du Rivet, et celui de l'exploitation n°2 GAEC de la Gambille

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