Fibrosité : les règles d'or d'une bonne ration

Sur un régime ensilage, à 22 kg de MS ingérés par jour, quatre critères fondamentaux permettent d’approcher la cohérence d’une ration : la MS, le NDF, l’amidon et la MAT. Pour mieux appréhender ces différents critères, il est nécessaire d’avoir la culture de l’analyse. Mais le retour sur investissement est garanti.

 

 

Matière sèche, viser 40 à 50% pour des rations à base d’ensilage

Une ration trop humide est souvent le fruit d’ensilages d’herbe récoltés à 20-22% de MS. Ces ensilages humides augmentent l’encombrement, favorisent les déviations fermentaires dans les silos et les pertes de valeur alimentaire par l’écoulement des jus. La perte d’appétence est également renforcée par une dégradation de l’azote et la libération d’ammoniac.

A l’origine d’une ration trop sèche on trouve souvent un ensilage de maïs récolté trop tardivement, à plus de 37% de MS, moins bien  broyé, avec du grain vitreux difficile à pulvériser. Pour ce type d’ensilage la valorisation de l’énergie est médiocre et les risques de mauvaise conservation au silo sont accrus. Un ensilage d’herbe à 40-45%, une part de foin ou d’enrubannage importante peuvent conduire à trop de fibres longues (>4 cm), souvent non digestibles qui vont entrainer du tri, de l’échauffement de ration et un film alimentaire perturbé.

 

22% d’amidon totaux dont 17% d’amidon dégradable et 5% d’amidon by-pass

L’amidon est un élément clé des apports énergétiques de la ration, son niveau est à maitriser. Une ration avec peu d’amidon fonctionne, mais dans ce cas le niveau de production, l’évolution de l’état d’engraissement, la richesse du lait produit, les résultats de la reproduction seront pénalisés. Les niveaux élevés d’amidon sont un gage de performance mais attention à l’excès. La quantité d’amidon total, la dégradabilité ruminale (DT amidon) et la  perte d’amidon sont des critères qui doivent être ajustés pour concilier production et santé des animaux.

Les céréales à paille, les protéagineux et le maïs grain humide apportent une part élevée d’amidon dégradable dans le rumen (DT >90%), d’autant plus qu’ils seront broyés finement. Au contraire le maïs grain sec et le sorgho grain sont des amidons  lents  car seulement 60% de leur amidon total est dégradé dans le rumen, le reste étant digéré en partie dans le gros intestin (amidon by-pass).

La génétique des fourrages a évolué, comme celle de vos vaches, elles sont capables de faire de gros repas rapidement mais elles ont du mal à bien valoriser plus de 22% d’amidon total (=4400 g d’amidon total/j). L’optimum dans la ration est de viser les 17% d’amidon dégradable (3700 g) et 5% d’amidon by-pass (1100 g). Arvalis a fait des mesures qui concluent que lorsqu’on passe de 22 à 29% d’amidon le gaspillage est de 0,3 UFL par point d’amidon supplémentaire. Par exemple, si le taux d’amidon total est à 25% on perd 3*0,3 UFL soit  0,9 UFL, c’est pratiquement l’équivalent d’un kilo d’orge perdu…..

Quand on utilise des ensilages d’herbe précoces, riches en sucre, il convient d’en tenir compte dans le rationnement : pour 1%  de sucre en plus, il faut réduire d’autant le taux d’amidon.

 

Surveiller de près la teneur et le type d’amidon des maïs

La DT amidon des ensilages de maïs est variable suivant le profil génétique et le stade de récolte. L’optimum, hormis pour certaines variétés qui n’ont pas d’amidon vitreux,  étant d’avoir 1/3 de vitreux, 1/3 de pâteux et 1/3 de laiteux pour une récolte entre 30 et 35% de MS. Il faut surveiller la maturité du grain pour déclencher la récolte.

Pour un ensilage de maïs à plus de 35% de MS, la digestibilité des fibres et de l’amidon diminue. Pour un ensilage qui passe de 32% à 38% de MS la DT amidon baisse de 8%, ce sont 25 g d’amidon/kg de MS qui traversent le rumen sans être dégradés et qui peuvent de retrouver dans les bouses si le grain est mal pulvérisé ou si le niveau d’amidon by-pass est supérieur à 5%.

 

Des fourrages digestibles à plus de 40% de NDF

Le NDF (Fibre au Détergent Neutre) correspond aux parois cellulaires d’une plante ou d’un concentré. La méthode de dosage du NDF permet d’avoir une segmentation plus précise que la cellulose brute. La digestibilité du NDF (dNDF) correspond à la digestibilité des fibres, elle est liée à la digestibilité de la matière organique (dMO). Si la dMO augmente, le dNDF augmente ce qui entraine une augmentation de la valeur UFL. En pratique, plus on aura des fourrages avec un dNDF élevé plus on pourra en faire ingérer aux vaches sans compromettre le niveau énergétique de la ration

Dans nos rations mixtes ensilage de maïs-ensilage d’herbe, si le dNDF des fourrages est élevé (>65% pour l’herbe,  > 52% pour les ensilages de maïs,> à 57% pour les foins) on pourra se permettre d’avoir une ration à 0,95 UFL/kg MS tout en ayant un taux d’amidon dégradable aux alentours de 17%. Par contre, si on dispose de fourrages récoltés plus tardivement, on risque d’avoir un niveau de NDF fort et peu digeste. La ration de base couvrira moins de litres de lait. Si on décide de compenser par des concentrés énergétiques, il faudra veiller aux niveaux d’amidon totaux et au coût de la ration.

 

 

 

 

 

 

15% à 17% de MAT

Le  niveau de MAT  (Matière Azotée Totale) est à mettre en lien avec le niveau de production espéré afin de bien valoriser l’énergie de la ration. Il faut viser entre 15 et 17% de MAT, soit un apport total de 3600 g pour 22Kg de MS ingérés. La dégradabilité théorique (DT) de l’azote d’un aliment  indique sa capacité à fournir de l’azote aux bactéries du rumen pour favoriser la synthèse des protéines. Ceci est d’autant plus important que la teneur en acides aminés (méthionine et lysine) est plus élevée dans les protéines microbiennes que dans les matières azotées alimentaires (tableau ci-contre).

 

 

Fibre mécanique et tri

Depuis 15 ans, la composition de nos rations a changé. Avec une part d’herbe plus importante certaines rations sont trop fibreuses et moins sécurisées à cause du tri des particules et des risques d’échauffement. Les normes existantes du tamis Penn-state n’étant pas adaptées à ce type de ration, nous avons décidé de tamiser des rations comportant plus de 25% d’ensilage d’herbe afin de ressortir les points clefs à maîtriser. Finalement, contrairement aux rations à base d’ensilage de maïs où la part de particules fines est à craindre, sur ce type de ration, c’est l’excès de particules longues qui peut poser problème.

 

 

 

 

 

 

Pierre GONIN, Adice Conseil Elevage

 

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