FROM’MIR : de nouveaux indicateurs de prédiction de l’aptitude fromagère du lait

La gestion de l’aptitude fromagère du lait est un défi pour les producteurs fermiers afin d’optimiser leur production. Différents projets sont aujourd’hui en cours afin d’améliorer le conseil sur cet aspect.

 

 

 

 

Le projet FROM’MIR :

Il a permis dans un premier temps de développer des équations de prédiction des caractères de l’aptitude fromagère du lait et de les appliquer à l’ensemble des spectres infrarouges issus des échantillons du contrôle de performance. À l’origine, ces travaux ont été réalisés afin de créer un nouvel index génétique en race Montbéliarde. Aujourd’hui, nous cherchons à utiliser ces indicateurs de prédiction de l’aptitude fromagère du lait dans le conseil apporté aux éleveurs.

Les variations de l’aptitude fromagère du lait :

L’aptitude fromagère du lait est principalement déterminée par sa composition, en particulier sa teneur en protéine et en matière grasse. Cependant, ces teneurs sont variables au cours de l’année, on observe une baisse de l’aptitude fromagère lors de la période estivale, en lien notamment avec la baisse des taux. Ce même phénomène est observé en début de lactation, particulièrement dans les élevages pratiquant le vêlage groupé. De manière concrète, l’été est marqué par des laits difficiles à travailler, alors qu’en période hivernale, on observe des laits plus riches qui facilitent la transformation et impactent positivement le rendement fromager.

Les différents indicateurs et repères :

Rendement laboratoire frais : L’objectif étant d’optimiser la quantité de lait transformée pour obtenir un kilo de fromage. Nous cherchons avec cet indicateur à avoir une valeur de rendement élévée. Afin de se situer et de faciliter l’interprétation de ces indicateurs nous avons créé des bornes moyennes en fonction de la production et de la période de l’année.

Indicateurs d’aptitude à la coagulation : ce sont deux indicateurs mesurés par l’outil Formoptic. Le principe repose sur un emprésurage du lait et une détection du changement d’état par l’intermédiaire d’un pendule plongé dans un godet et permet d’obtenir la courbe ci-contre, illustrées par deux indicateurs. Les valeurs sont exprimées en indice de fermeté (IF) : la fermeté du gel (aR) et la vitesse d’organisation du gel (Tg10). L’objectif est de se rapprocher des valeurs références en fonction de la période afin de s’adapter aux variations de la composition du lait.

 

Les taux : principale cause de variation 

Une analyse des différents facteurs faisant varier les indicateurs FROM’MIR a été réalisée. L’indicateur de rendement frais serait corrélé positivement, à la teneur en matière grasse du lait, alors que les indicateurs d’aptitude à la coagulation seraient davantage corrélés à la teneur en matière protéique du lait.  Ces taux varient eux-mêmes à l’échelle du troupeau en fonction de la race, de la période de l’année ou encore de la conduite du troupeau. Quant à l’alimentation, nous n’avons pas observé de différences sur FROM’MIR entre les différentes rations hivernales.

 

 

Reflet du terrain :

L’indicateur de rendement FROM’MIR a été comparé au rendement mesuré chez plus d’une trentaine de producteurs fermiers du Cantal de janvier à juin 2024. Une corrélation de plus de 85% a été observée entre ces deux rendements ce qui a permis de vérifier la cohérence de l’indicateur FROM’MIR sur le terrain et donc de valider son utilisation dans le conseil apporté aux producteurs fermiers.  

La suite du projet FROM’MIR :

L’utilisation de ces indicateurs sont aujourd’hui encore au stade de projet. Ainsi, le travail se poursuivra par une analyse de la cohérence des indicateurs des paramètres de coagulation sur le terrain à l’image de l’étude qui a été réalisé pour l’indicateur de rendement. Un outil de valorisation est en cours de réalisation et permettra d’utiliser de façon concrète ces indicateurs sur le terrain afin de mieux les maitriser. Il sera également intéressant de prendre en compte la qualité microbiologique des laits afin de veiller au bon maintien des indicateurs.  Enfin, il serait possible de prolonger l’étude afin de comparer les indicateurs FROM’MIR à la qualité organoleptique des fromages.

              

Témoignage : GAEC de l’Allée d’Espinet, Vezac (15)

Laurent et Patrick Lours sont installés sur une exploitation avec une SAU de 102 hectares. Ils ont opté pour un séchage en grange afin de valoriser au mieux l’herbe produite. Ils conduisent un troupeau de 80 vaches laitières de race Montbéliarde à 6700 kg de moyenne avec un taux butyreux de 40,7 g/L et un taux protéique de 35,4 g/L. Ils transforment à la ferme une partie de leur production laitière en fromage, AOP Cantal et Salers.

Comment se passe la transformation fromagère au quotidien ?

Nous transformons toute l’année en Cantal fermier et du 15 avril au 15 novembre s’ajoute la production de Salers. Ces fromages sont en grande partie affinés à la ferme puis sont vendus en vente directe à la ferme et dans différents commerces. Nous avons cependant gardé le lien avec une laiterie afin de pouvoir livrer notre lait le week-end, préservant ainsi notre rythme de travail. Cela nous permet également de suivre de façon hebdomadaire la qualité du lait et notamment le taux d’urée, un indicateur que nous suivons de près car il nous permet de confirmer nos observations en fromagerie et d’ajuster au mieux notre fabrication.

Quelles sont les principales difficultés que vous rencontrez lors de la transformation ?

Nous rencontrons davantage de difficultés lors de la période de pâturage. Cette pratique entraine une variation importante de la composition du lait et notamment des taux. Nous adaptons alors notre égouttage lors du décaillage, par un découpage du caillé plus ou moins gros. En période hivernale, depuis que nous avons mis en place le séchage en grange nous observons des laits plus faciles à travailler et avec moins de variations par rapport à notre ancien système basé sur l’ensilage.

Sur quel aspect souhaitez-vous être davantage accompagné ?

Aujourd’hui, notre objectif est d’avoir à la fois un lait facile à transformer, et d’obtenir des produits de qualité tout en maximisant notre rendement fromager. Pour cela, nous cherchons à avoir un lait riche en taux, et notamment en protéines. Nous souhaitons donc être accompagnés sur ce sujet grâce à deux leviers principaux. D’une part, sur l’alimentation des vaches laitières afin d’éviter au maximum les variations. Et d’autre part, en travaillant sur la génétique du troupeau, grâce à une sélection importante sur les taux et en essayant à moyen terme de prendre en compte de plus en plus l’index k-caséine sans négliger la santé des pieds et la conformation de la mamelle.

Margaux Mollon, Cantal Conseil Elevage

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