Valoriser les graines de soja produites localement

L’autonomie alimentaire du troupeau limite l’exposition des exploitations aux aléas climatiques et économiques. La région Auvergne Rhône Alpes possède de nombreuses filières de transformation du lait sous label de qualité,exigeant l’absence d’OGM dans l’alimentation des animaux. L’impact carbone du soja importé est très négatif. Développerdes filières locales réduit les émissions degaz à effet de serre. Tous ces argumentsplaident en faveur de l’utilisation des graines de soja, produites localement,dans les rations des vaches laitières.
 

 

 

Surveiller le taux de matière grasse total de la ration

Le taux de matière grasse contenue dans la graine crue, autour de 23%, se traduit par une valeur énergétique élevée (1,27 UF). Ces UFL vont être favorables à la synthèse de matière grasse et au stockage corporel. Cette teneur en lipides est la principale limite à l’incorporation de la graine de soja crue en grande quantité dans les rations. La ration totale ne doit pas dépasser 4 % de matières grasses par kg de MS. Au-delà, on observe une diminution de l’appétence, de l’ingestion et du TB. La graine de soja crue peut être distribuée aux vaches laitières en remplacement partiel du tourteau de colza.
Assurer une autonomie protéique totale sera difficile avec des rations tout ensilage de maïs, le seuil d’incorporation optimum étant limité à 2 kg. Pour des rations comportant plus d’herbe ou de la luzerne, l’autonomie presque totale est envisageable pour couvrir jusqu’à 24 kg de lait.
Dans le cadre de l’expé PEP « valorisation de la graine de soja crue » en ration foin, les taux protéiques et butyreux sont peu affectés (respectivement + 0.5g et -0.9g) par la graine de soja crue et de manière non significative. Cela dépend du niveau d’incorporation et du type de ration. Au-delà de 3kg bruts les performances sont dégradées. Parallèlement, le profil des acides gras du lait produit s’améliore au plan nutritionnel. Les acides gras insaturés et les omégas 3 augmentent légèrement mais sans atteindre ceux de la graine de lin.
 
 
 
 
 

 

Traiter les graines pour améliorer les valeurs alimentaires

La conservation des graines de soja entières ne pose pas de problème particulier. Elles peuvent être broyées ou aplaties sans difficulté, mais après le risque de rancissement est plus important. Il est préférable de broyer les graines pour une durée d’un mois maximum.
Différents process peuvent être utilisés pour réduire le taux de matière grasse ou augmenter la disponibilité des protéines. Le toastage (ou extrusion) consiste à chauffer la graine, ce qui modifie le profil de dégradation des protéines mais ne réduit pas le taux de matière grasse. Le pressage à chaud, technique expeller, permet d’extraire plus de matière grasse et d’augmenter le pourcentage de protéines disponibles dans la ration.
Les traitements suppriment les facteurs antinutritionnels de la graine de soja. Ceux-ci ne sont pas nuisibles pour les vaches laitières mais le sont en cas d’utilisation pour des veaux de moins de 6 mois.

 

Ne pas oublier l’intérêt agronomique du soja

La culture du soja, comme tous les protéagineux, a de nombreux intérêts agronomiques. La racine pivotante et les binages successifs sur des sols portants ont un effet de
structuration du sol. C’est un excellent précédent par ses restitutions. Cette culture permet une alternance culture de printemps et culture d’hiver. Cela limite la sélection d’adventices.
Les besoins en engrais sont limités : 0 en azote et faible en P et K (30 à 50 unités). Les restitutions azotées sont favorables à l’implantation d’une céréale à la suite de la récolte (40 à 60 u d’azote de restitution).
Il semble également que la culture du soja ne soit pas attaquée par les sangliers, ce qui est un avantage dans de nombreuses communes de la région
 

Pour quel intérêt économique ?

En substituant 1kg de tourteau de soja acheté par 2 kg de graines, pour un troupeau de 50 VL, l’économie possible est de 10 tonnes d’aliment pour 200 jours d’hiver. Avec un prix du tourteau de soja élevé (supérieur à 360€/tonne), la rentabilité économique est atteinte rapidement. Il faut toutefois ajouter du tourteau tanné sur certaines rations.
Des simulations ont été réalisées dans le cadre du PEP bovin lait en 2015 et selon plusieurs hypothèses: prix d’achat de tourteaux de soja OGM ou non, prix d’équivalence d’un hectare de maïs, rendements attendus...Le coût de production d’un hectare de soja est de 735€ soit 250€/T MS de graine crue (pour 30qx de rendement). Depuis 2014, le prix de revient de la graine de soja est souvent plus cher que du tourteau de soja classique.
Néanmoins, en cas de recherche de tourteau tracé sans OGM, la graine de soja crue est une alternative économiquement intéressante (sous réserve d’un rendement supérieur à 30q/ha).
L’intérêt économique est donc à réfléchir en fonction de la structure globale de l’exploitation. Les outils de traitement des graines sont à réfléchir en commun. Plusieurs projets d’installation de toasteurs sont en cours dans la région.
 
 
Anne BLONDEL - ACSEL Conseil Elevage
 

 

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