Pâturage : offrez leur de l'herbe dès que vous pouvez !

Arguments économiques, environnementaux ou sociétaux, les dernières années le démontrent bien, il est un enjeu de taille que de savoir valoriser l’herbe lorsqu’elle est disponible. Ainsi, savoir adapter son pâturage aux conditions climatiques changeantes est un défi à relever !

 

 

La pleine pousse :

Quelle soit récoltée ou pâturée, l’herbe est un fourrage de grande qualité nutritive pour les animaux mais qu’il faut savoir gérer au mieux pour en tirer profit. Les préconisations printanières en matière de mise à l’herbe et de gestion de la ressource fourragère sont évidemment toujours de mise et plus que jamais il est primordial de savoir ajuster la ressource disponible vis-à-vis des besoins du troupeau et des croissances de l’herbe. Fermer des silos même pour quelques semaines en période d’explosion de l’herbe peut se révéler très bénéfique pour préserver les performances technico-économiques et la gestion de stock !

Le creux d’été :

Il faut aujourd’hui également savoir palier avec les périodes de « non-pousse » de plus en plus longues et répétées. Difficile à anticiper, Il y a pourtant un véritable enjeu à maitriser ces phases critiques. Réintroduire les surfaces fauchées précédemment, implanter des légumineuses ou des espèces fourragères dites résistantes ne suffit pas toujours. Savoir respecter son sol et sa flore en s’interdisant le surpâturage et le piétinement est un investissement pour l’avenir.

Les repousses d’automnes :

La reprise de croissance est variable d’une année à l’autre mais est toujours intéressante à valoriser. Contrairement aux idées reçues, les valeurs alimentaires sont bonnes dès lors que l’on place les plants dans de bonnes conditions de croissance et les animaux dans de bonnes conditions de pâture (temps de présence, temps de repos, hauteurs d’herbe…). Sur le département de la Haute-Loire, malgré un fort déficit pluviométrique annuel, le retour de quelques précipitations de fin d’été a permis d’offrir un potentiel automnale bien supérieur à celui observé sur la période de printemps.

S’adapter rapidement et se tenir prêt à valoriser par le pâturage, une croissance de l’herbe de plus en plus innatendue et  étalée dans le temps est très certainement un enjeu crucial de demain pour quiconque voudra conserver une efficience technique et économique avec des animaux à l’herbe.

 

GAEC LE PAYS DES SUCS – Nadine et Christian MICHEL, Denis FAYOLLE – YSSINGEAUX (43)

« Nous recherchons un système économe et performant orienté sur l’optimisation de nos récoltes d’herbe ».

Au GAEC « Le pays des Sucs », ce sont deux troupeaux qui sont conduits en parrallèle : un atelier allaitant de 30 mères Aubrac et 52 vaches laitières (mixtes, PH et Montbéliarde) et la suite sur 130Ha. L’objectif est de valoriser le plus possible l’herbe produite sur l’exploitation. La pâture y a une place de choix.

 

Pouvez-vous nous décrire votre système fourrager ?

Nous cultivons 18ha de céréales et 12ha de maïs ensilage, le reste est en prairies permanentes et temporaires. L’intégralité des surfaces est destinée à l’alimentation de nos animaux. Au fil de l’accroissement de la structure nous nous sommes tournés sur une hausse de la part d’herbe. Nous n’avons pas souhaité intégrer plus de maïs dans notre système car cela aurait déséquilibré notre assolement, mais nous ne souhaitons pas l’arrêter car il sécurise nos stocks et la densité énergétique de notre ration, notamment lorsque le pâturage diminue.

 

Comment avez-vous souhaité faire évoluer votre structure ces dernières années ?

Les deux troupeaux sont historiquement présents sur la ferme. Le troupeau d’Aubrac valorise les surfaces les plus lointaines et nous avons souhaité diminuer un peu l’atelier lait du fait de notre activité de découpe et vente directe. Ce changement s’est opéré en diminuant le nombre d’animaux mais en conservant notre production annuelle de lait. C’était une bonne décision pour nous car nous subissons un peu moins de pression sur le bilan fourrager dorénavant. Nous avons toujours souhaité conserver une dimension économique en valorisant au maximum les fourrages et notamment l’herbe.

 

Quelle est la place du pâturage pour le troupeau laitier ?

L’herbe a une place prépondérante pour nous. Faire pâturer les animaux nous semble une évidence, que ce soit en termes d’image, de santé animale que de performance économique. Nous visons une mise à l’herbe précoce avec un déprimage des parcelles proches et gérons les chantiers d’ensilages en deux récoltes à une dizaine de jours d’intervalles, cela nous permet ainsi d’obtenir un décalage de pousse lorsque nous remettons ces parcelles dans le circuit de pâturage. Nous diminuons considérablement l’apport de fourrages conservés et notamment d’ensilage de maïs en fonction de la dynamique de pousse. Le prochain objectif serait de fermer complétement le silo une période.

 

Quelles pratiques avez-vous mise en place pour vous adapter ?

Ce sont les périodes estivales qui sont les plus dures pour nous. Nous avons pris le parti de limiter l’effectif de vaches à traire durant les mois d’été afin de garantir un pâturage de qualité pour les vaches restantes. Les taries partent sur des parcs éloignés. Nous réalisons un pâturage tournant, l’été ainsi les vaches restent moins longtemps sur les paddocks qu’au printemps. Avec cette pratique, le pic de vêlage débute dès la mi-août, cela nous permet de bien valoriser la pousse de l’herbe via le pâturage d’automne.

 

Comment avez-vous géré cette saison de pâturage ?

On pourrait presque parler de deux saisons en une seule année : un été catastrophique où les vaches sont très peu sorties et ont tapé dans les stocks, et une arrière-saison qui ressemblait à une seconde mise à l’herbe où cette fois-ci les animaux ont pleinement pu pâturer une herbe de qualité jusqu'à tard dans le mois de novembre. Nous n’avons pas hésité à laisser les vaches au bâtiment cet été pour préserver nos parcelles et ainsi les mettre dans de bonnes conditions de reprise le moment venu. Nous sommes conscients que ce type d’année risque de se reproduire et qu’il faudra saisir toutes les opportunités pour aller chercher de l’herbe à des moments où l’on avait historiquement moins l’habitude.

 

Jérôme Gachet, Haute-Loire Conseil Elevage

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