Plusieurs témoignages d'éleveurs ont été recueillis autour des méthodes alternatives de commercialisation. Vous retrouverez dans cet article les témoignages de la Ferme du Chervolin (69), Damien BRUNET de La Chève du Bancel (26) et du Gaec de Lichières (07).
« La ferme du Chervolin - 1 UTH + 1 salarié, 95 chèvres, fromager, Montromant (69)
Des paniers familiaux pour écouler une partie de la production
Suite au Covid 19 et à la fermeture des marchés comment s’est organisé la commercialisation ?
A l’annonce de la fermeture des marchés, j’ai compris que je n’avais plus de débouchés. La 1ère semaine, j’ai fabriqué des tommes de 12 KG mais j’ai vite été débordée, me retrouvant avec 1T de fromages sur les bras ! De plus, mes chèvres étaient en plein pic, il fallait vite réagir.
Grace aux réseaux sociaux et au bouche à oreille, j’ai commencé à commercialiser mes produits sous forme de paniers familiaux, œufs, fromages et légumes produits par mon compagnon.
En parallèle, des groupes de consommateurs se sont mobilisés pour faire le lien avec les producteurs sur tout le bassin lyonnais.
Les mairies ont aussi joué un rôle essentiel sur l’organisation de points de collecte, grâce à la communication et à la volonté des consommateurs de consommer local.
Comment t’es-tu organisée ?
C’était une période très dure, cela m’a demandé une grosse préparation en amont pour la commande et préparation des paniers. Il y a eu beaucoup de stress et de petites mains pour palier à la demande, j’étais constamment au téléphone !
Mais en contrepartie j’ai pu écouler une partie de ma production d’œufs et de fromages, même si le stock reste conséquent. La fromagerie reste encore bien saturée, j’espère vendre ce stock plus tard. Ce système m’a beaucoup aidé, mais il n’a pas suffi à écouler toute la production.
Par la suite vas-tu continuer ce système de vente ?
La reprise des marchés a été un grand soulagement pour moi et une baisse de pression psychologique, j’ai pu retrouver mes clients. A l’heure actuelle, c’est encore compliqué : 4 marchés sur les 6 ont rouvert, ça ne permet pas encore d’écouler toute la production. Cependant, je continue à faire quelques paniers en mode drive lors des marchés ou à la ferme.
Je pense que cette méthode a de l’avenir en complément des marchés. C’est plus facile de pouvoir prévoir ses ventes afin de gérer au mieux les stocks : contrairement au marché, on sait à l’avance ce que l’on va vendre.
Propos recueillis par Séverine Fontagnères, Rhône Conseil Elevage
« Damien BRUNET, La Chèvre du Bancel, 145 chèvres saanen à Saint Sorlin en Valloire (26)
Mise en place d’un marché à la ferme
Depuis quand et comment ?
A cause du confinement nous avons perdu 2 marchés sur nos 3 habituels, il a donc fallu trouver d’autres débouchés. Ça fait un moment que j’avais en tête de créer un marché à la ferme, j’ai donc contacté différents producteurs du secteur et nous nous sommes lancés.
Depuis le 27 mars nous faisons le marché sur ma ferme tous les vendredis de 15h à 18h30. Pour notre premier marché nous étions 3 producteurs (fruits/légumes, charcuterie et fromage de chèvre). Et aujourd’hui nous sommes 6.
Pour ce qui est de la communication nous avons seulement fait de la pub via Facebook.
Comment se passe les marchés ?
Ça se passe très bien. Nous avons eu quelques difficultés à trouver l’organisation par rapport aux restrictions liées à la COVID-19. Nous avons mis à disposition du gel hydroalcoolique à l’entrée du marché et bien espacé les stands pour que les clients puissent respecter les distanciations physiques.
Pour vous quelles ont été les avantages ?
En premier j’ai fait ce marché pour assurer les ventes de fromages mais le principal avantage a été le gain de temps : je suis directement sur place donc il n’y a pas de temps de trajets. Et si nous manquons de fromages sur le stand nous avons juste à aller dans notre fromagerie en chercher. Nous faisons 2 à 3 fois plus de vente que sur notre marché du samedi matin. A la ferme c’est plus convivial entre les producteurs que sur le marché.
Un seul inconvénient : LES MOUCHES !!!! Car les chèvres sont juste à côté.
Pérennité post-confinement ?
Nous sommes toujours 5-6 producteurs. Mais nous avons changé les horaires pour que les clients ayant repris le travail puissent venir, de 16h à 19h.
Pour la suite, nous voudrions le continuer au minimum jusqu’au tarissement des chèvres à l’automne et nous verrons ensuite pour l’an prochain.
Propos recueillis par Aude Pasquet, Adice
« GAEC de Lichières, 45 chèvres alpines, élevage fromager à Gras (07)
Des permanences de vente sur les places des villages voisins
Une ancienne habitude de commercialisation particulièrement adaptée en ces temps de covid.
Solenne et Julien JUNIQUE se sont installés en 2018 en tant qu’éleveurs caprins fromagers à Gras (07). Ils ont repris le circuit de commercialisation historique de la ferme, mis en place il y a 30 ans : les permanences de vente dans les villages voisins. Ce mode de commercialisation leur permet d’écouler près de 2/3 de la production. Le reste est vendu via des intermédiaires : épiceries, restaurants, moyennes surfaces, etc...
Comment se déroulent vos permanences dans les villages ?
Nous nous déplaçons dans 3 communes voisines : une le jeudi matin, une le jeudi soir (plusieurs producteurs se sont joints, c’est donc devenu un petit marché de producteurs) et une le vendredi soir. Nous installons notre stand sur la place du village et restons sur place entre ½ h et 1 heure. Le jour, l’horaire et le lieu sont fixes. Ce sont des villages où il n’y a pas de marché existant et nous avons une autorisation de la mairie.
Pendant le confinement nous avons mis en place un système de commande avec retraits aux lieux habituels ou livraison à domicile. Cela a très bien fonctionné et a reboosté les ventes. Nous sommes maintenant revenus à notre système habituel de point de vente sans pré-commande, beaucoup moins chronophage.
Quels sont les avantages/inconvénients de ce mode de commercialisation ?
Le principal avantage est le fait que ce soit peu chronophage. C’est une bonne alternative à la vente à la ferme car nous répondons à une demande locale sans passer trop de temps à la commercialisation. Cela permet aussi de créer un peu d’animation dans les petits villages.
En revanche, il faut se faire connaitre. Avec ce système nous ne touchons qu’une clientèle d’habitués. Nous avons eu la chance de récupérer un historique de 30 ans de vente via ce circuit. Pour quelqu’un qui démarre il faut le temps que ça se mette en place et il faut faire de la communication.
Propos recueillis par Camille Lemoine, Adice