Le strip till, outil de travail entre labour et semis direct

Strip Tiller, ou travail en bandes, c’est ouvrir un passage à travers les résidus en créant un lit de semence comparable à un travail conventionnel, mais tout en laissant les résidus en surface entre les rangs pour conserver au maximum les avantages du semis direct.

Le strip till, la technique et ses intérêts

Suivant le type de sol et de couvert, la largeur de la bande travaillée varie de 10 à 20 cm, avec une profondeur de 15 à 30 cm. Le strip-till est considéré à mi-chemin entre le travail du sol conventionnel et le semis direct, il reprend les aspects positifs de chacune des techniques.

Labour :

  • Réchauffement plus rapide du lit de semences, grâce à la non-présence de résidus sur la bande.
  • Propreté du lit de semences, pas de gêne à la levée occasionnée par la présence de résidus en surface.
  • Création de porosité et développement racinaire favorisé, effet du travail de fissuration en profondeur de la dent.
  • Rapidité de développement de la plante, le travail du sol accélère la minéralisation rendant l’azote disponible plus rapidement.

Semis direct :

  • Réduction des coûts de production (GNR, engrais), grâce à la fertilisation localisée et la réduction du nombre de passages.
  • Non mise en germination des graines d’adventices dans l’inter rang, travail unique sur la bande de semis.
  • Conservation du risque d’érosion et augmentation de la vie biologique du sol.
  • Maintien des résidus dans l’inter-rang.

Le strip-till permet donc de profiter des intérêts du semis direct, tout en gardant la sécurité d’un travail conventionnel. La période de travail au strip-till sera fonction du type de sol, comme en travail classique. En sols lourds (> 20% argile), le passage se fera en automne/hiver. En sols légers, le passage se fera au printemps.

Combiner c’est tentant…

Les bonnes conditions de strip-till et de semis correspondent à des périodes d’interventions différentes. En sol argileux, aussi bien avant un semis de printemps qu’un semis de colza, le passage du strip-till se fait bien avant le semis afin de laisser la terre évoluer, il n’est pas donc pas possible de combiner. Au printemps, combiner en terres argileuses va provoquer un lissage et créer une « tranchée » sur laquelle il serait impossible de semer correctement, qui favoriserait les limaces et compromettrait le développement futur de la culture.

En sols limoneux ou sableux, on gagne à laisser « blanchir » la terre avant de semer. En conventionnel, il nous ne viendrait pas à l’idée de semer dans la foulée un travail qui n’a pas blanchit, il faut garder cela en tête lorsqu’on « strip-till ». Le but est d’avoir une levée uniforme qui démarre fort, cela ne peut être obtenu qu’en semant sur sol réchauffé.

Effectivement, dans des cas très précis, terres très légères, homogènes, sol bien réchauffé, eau à disposition au cas où, le combiné peut s’envisager : cela fait beaucoup de « si ». En maïs grain, une levée irrégulière, due à une irrégularité de terre ou un travail en conditions un peu limites, … et c’est vite 10 voire 20 quintaux en moins… Un passage de semoir coûte peut être 20 à 40 €/l’ha, au prix du maïs actuel, le jeu en vaut-il la chandelle ?

Yannick BLANC, Drôme Conseil Elevage

Témoignage de L’Earl des Terres Blanches, Grand serre (26)

Pascal et Céline FERLAY, éleveurs laitiers de 45 Prim’Holstein et 250 Saanen : "Utiliser cette technique pour gagner du temps et de l’argent pour un résultat équivalent voir supérieur."

Des débuts prometteurs

J’ai démarré la technique du strip-till en 2013 pour un essai de 4 ha de maïs derrière un RGI, en semis très tardif (02/07/13). Le résultat de ce maïs, avec irrigation, en sol très argileux, fut exceptionnel. J’ai donc voulu aller plus loin encore dans cette technique. En constatant que la technique du strip till pouvait fonctionner chez moi et avec mes différents types de sols, on a semé des colzas de semence, une réussite aussi, et super simple, même avec un protocole de semis complexe, il suffit de tracer vos lignes (parents mâles et parents femelles) et de semer ensuite.

Au strip till, on ne travaille que la ligne de semis en ne touchant pas l’inter-rang pour conserver un maximum de vie au sol et lorsqu’il pleut ou avec irrigation, et vu que l’inter rang n’est pas travaillé, l’eau migre vers la ligne de semis. La portance des sols est augmentée lors des récoltes, notamment en chantier ensilage en conditions humides car chez moi nos terres ressemblent fortement à celle de la Camargue! Le premier outil que j’avais acheté n’était pas très adapté car la préparation du lit de semences était imparfaite (peu de terre fine et peu de rappui). La dent ne travaillait pas assez en profondeur, ce qui a eu comme conséquence la formation d’une croûte de 15 cm. Après être allé en visite chez des agriculteurs Suisses utilisant la technique du strip-till, j’ai opté pour l’achat d’un strip till rotatif de marque OEKOSEM, en 4 rangs.

Je l’ai utilisé en combiné avec le semoir pour mes semis de maïs 2014 derrière un RGI-Trèfle incarnat. Un traitement de 5 L/ha de glyphosate est réalisé sur le couvert avant le passage du strip-till. Les équipements du strip-till permettent d’avoir une ligne de semis propre grâce au rotor qui découpe les touffes de RGI, et une dent de décompactage permet une fissuration régulière (25 cm/30cm) et 30 cm de large.

La levée de mes maïs a été homogène et régulière, après on prend l’itinéraire cultural normal d’un maïs ensilage. J’ai économisé du temps et de l’argent : un seul passage au lieu de 3 avec un labour plus herse et semis.

Perspectives pour 2015.

Le strip-till me semble une technique intéressante pour sécuriser l’implantation de mes maïs et le développement optimal des plantes. Elle me permet surtout d’intensifier mes surfaces destinées aux vaches laitières et chèvres, et donc de me diversifier dans la production de semences en dégageant des surfaces. L’idée qu’en un seul passage, on puisse dégager les résidus végétaux, fissurer, faciliter le réchauffement et le ressuyage m’a séduite.

Pour 2015, je vais rajouter un localisateur d’engrais au strip-till pour un apport azoté au semis sur le rang pour  un meilleur démarrage en végétation ce qui est la clé de cette technique. Je pense aussi économiser encore plus de temps en semant à l’automne l’intégralité de mes 40 ha de maïs en 2015, 12 ha de maïs semence, 8 ha de tournesol semence et 6 ha de colza semence. J’ai consommé environ 23 l/ha de carburant avec la technique de strip-till contre 120 l/ha la technique conventionnelle. Je pense faire une économie de 2 200 litres de fuel, pour uniquement la partie semis de printemps. A ce rythme-là, l’outil sera vite amorti !

Propos recueillis par Yannick BLANC, Drôme Conseil Elevage

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