Gérer ses filiations pour améliorer les performances de son troupeau

L’amélioration de sa génétique se fait aussi grâce à la connaissance de ses filiations

Si la sélection par la voie femelle reste incontournable pour progresser génétiquement et donc améliorer la rentabilité de son atelier, la sélection par la voie mâle est un levier qui est parfois négligé mais tout aussi important. Il est alors essentiel de connaître ses généalogies…

 

 

Connaitre les filiations pour progresser

Seul 40% des filiations des chèvres inscrites au contrôle laitier sont connues. Ce manque d’information est problématique car cela empêche de maximiser la connaissance génétique du troupeau. En effet une meilleure connaissance de ces filiations permet d’optimiser les accouplements. Le choix des chevrettes de renouvellement est donc facilité. A contrario, il est possible de repérer plus précocement les animaux à niveau génétique peu intéressant et de ne pas les conserver. Cela limite le surcoût de l’élevage des jeunes, sachant qu’une chevrette coute environ 150€ à élever. 

Enfin pour des raisons sanitaires, nombre d’éleveurs sont amenés à élever des boucs de leur propre élevage. Pour cela, il est important d’avoir une bonne connaissance des filiations afin de limiter le risque de consanguinité. Le progrès génétique est assuré et la variabilité maximisée.

 

L’influence des filiations sur la rentabilité de l’atelier 

Pour conserver les filiations maternelles, la descendance doit être identifiée à la naissance.

En revanche, la connaissance de la paternité peut se compliquer, particulièrement dans les gros troupeaux  où les éleveurs ont plus facilement tendance à mettre plusieurs boucs par lot. Il faut donc réorganiser la reproduction en faisant des lots plus petits de façon à ne mettre qu’un seul bouc. Sinon, la monte en main peut-être une autre solution : même si elle est chronophage, elle permet de bien gérer la consanguinité et de moins épuiser les boucs.

 

L’indexation, un outil de sélection

Les éleveurs travaillant sur leurs filiations peuvent disposer d’index fiables : lorsqu’ils sont connus (taux, lait, morphologie, cellules…) cela écarte le biais du milieu sur les performances de l’animal.  Ainsi certaines chèvres peuvent avoir un bon potentiel génétique qui peine à s’exprimer dans leur milieu. Pour autant , leur descendance peut être génétiquement intéressante à conserver.

 

L’insémination animale :  un investissement sur l’avenir

Si l’insémination a été créé principalement pour des raisons sanitaires (limiter les transmissions de maladie entre troupeau via l’échange d’animaux), les éleveurs y ont rapidement vue d’autres avantages, notamment économique. En effet, elle permet une augmentation de la production et de la richesse du lait.

 

En effet, l’IA a ainsi permis à de nombreux éleveurs d’avoir accès a une génétique de qualité. Les boucs sont rigoureusement sélectionnés d’après leur parenté et une 40aine d’entre eux sont ainsi choisis chaque année pour entrer au schéma de sélection. L’insémination, couplée à un contrôle de performance du troupeau, permet également d’avoir des accouplements optimisé. Si certains éleveurs se contentent de n’inséminer que quelques chèvres afin de produire leurs futurs boucs reproducteurs, on s’aperçoit que les chevriers qui ont un taux d’IA supérieur à 50% afin d’avoir le maximum de chevrettes issues d’IA, pour le renouvellement du troupeau souche ont un niveau de production largement supérieur à leurs collègues qui n’en font peu ou pas.

 

L’investissement génétique permet un vrai gain économique : on remarque près de 200kg de lait en plus pour les éleveurs ayant 50% de femelles issue d’IA par rapport à ceux en ayant moins de 10%.

Dans le même temps, les taux sont maintenus voire augmentés. La marge brute est supérieure pour ces éleveurs là puisqu’on estime que pour 1€ investi dans la génétique du troupeau (contrôle laitier + insémination), il y a 7€ de retour sur investissement.

 

Frédéric Pacaud, ACSEL Conseil Elevage

 

« GAEC de Baffy

Anaëlle Barbe, éleveuse pilier à Saint Germain Laval (42), suit la filiation de ses chevrettes : pour elle c’est une étape importante pour faire évoluer son troupeau et éviter les entrées d’animaux.

 

Le GAEC de Baffy est une exploitation laitière qui comporte un troupeau de 150 chèvres Alpines et Poitevines avec des mises-bas saisonnées. Les chèvres sont conduites dans un système foin-pâturage. Cette exploitation a toujours suivi la filiation maternelle et paternelle de ses chevrettes.

 

Quelle est la raison principale du suivi de la filiation des chevrettes sur votre exploitation ?

Etant indemne de CAEV, la raison principale est que nous ne voulons pas importer d’animaux sur notre exploitation. Nous souhaitons conserver notre statut sanitaire et aussi ne pas apporter de maladies qui ne sont pas présentes dans notre troupeau. Pour cela, il faut que nous puissions utiliser nos boucs de ferme. Afin d’avoir des mâles de bonne valeur génétique, nous pratiquons environ 60 IA par an. Nous gardons ainsi 8 à 10 boucs présents chez nous.

Comment organisez-vous en conséquence la saison de reproduction ?

Lorsque l’on veut suivre les paternités, on trouve toujours des moyens pour le mettre en place et cela est essentiel pour moi. Les primipares sont conduites séparément des multipares lorsque les chèvres sont en bâtiment, je peux déjà faire un lot séparé pour les reproductions. J’ajoute à ce lot quelques chèvres qui ont 2 lactations pour obtenir un groupe de 45 chèvres, ce qui correspond à un lot de traite. Pour séparer les autres chèvres, j’utilise des barrières le temps de la saison de reproduction.

Le second lot est constitué de bonnes chèvres alpines sur lesquelles je compte élever des chevrettes en priorité, le troisième comporte des chèvres de race Poitevines et enfin, les moins bonnes laitières constituent le dernier lot. Les chèvres mises à l’IA sont conduites séparément jusqu’aux retours de chaleurs après insémination, ensuite elles sont réparties dans les différents lots. Je gère donc au total 4 lots différents, mon bâtiment me le permet. En ce qui concerne les chevrettes, je les laisse avec plusieurs petits boucs nés de la même année et je n’élève jamais dessus.

Quels autres intérêts voyez-vous à suivre cette filiation ?

Cela nous permet d’améliorer notre troupeau plus rapidement ! Nous évitons ainsi la consanguinité et nous connaissons le potentiel en lait et en taux de nos chevrettes. Le choix de nos animaux de renouvellement, mâle et femelle, est plus facile et plus pertinent. La filiation couplée au suivi des lactations de nos primipares nous aide également à connaître la valeur de nos boucs plus âgés.

 

Propos recueillis par Morgane Lambert, Loire Conseil Elevage

 

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