Bilan Patu'RA 2015/2018

Connaitre la dynamique de pousse est fondamentale pour maîtriser le pâturage. L’expérimentation appelée « Patur’RA » conduit dans le cadre du PEP et financée par la Région a permis d’établir des repères de la croissance de l’herbe. Ce sont, pendant 4 années, 34 exploitations de Rhône-Alpes qui ont été suivies de mars à novembre.

 

 

Le suivi est basé sur des mesures avec un herbomètre dans des parcelles pâturées. La croissance est obtenue par différence de hauteur d’une semaine à l’autre sur une même parcelle.

Sur la saison de pousse de l’herbe (mars à novembre), la pousse est très variable. Elle peut aller de moins 10 kg de MS/ha/j à plus de 100 kg MS/ha/j. Avec une croissance journalière de 60 kg MS et un chargement de 25 ares par vache (soit 4 vaches par ha), on peut espérer faire consommer 15kg de MS pâture par jour et par vache. En revanche avec une croissance de 30 kg/j/ha l’ingestion potentielle ne sera plus que de 7.5kg de MS soit une demi ration. La connaissance du potentiel de croissance de nos prairies doit nous permettre d’anticiper les décisions et surtout de réaliser un prévisionnel de pâturage.

 

De ces 4 années, une courbe moyenne se dessine avec différentes phases que l’on pourrait nommer :

  1. Démarrage de végétation
  2. Pleine pousse
  3. Décroissance de fin de printemps
  4. Creux d’été
  5.  Repousse d’automne

 L’objectif est d’adapter ses pratiques en fonction du potentiel de croissance de la période.

 

 

 

Démarrage de végétation

Lâcher tôt et en douceur

Cette phase dure de 20 à 30 jours et débute avec l’augmentation des températures à partir 300°c de cumul au 01/02. Elle permet de réaliser une transition en douceur.  A partir de ce cumul température, la mise à l’herbe peut intervenir dès que la portance est bonne. Sur la première semaine, il faut prévoir des temps limités de présence au pâturage. Une heure à la pâture permet aux animaux d’ingérer 2kg de MS. C’est aussi le moment de déprimer toutes les prairies accessibles au pâturage.  Il faut ajuster le nombre de ration à l’auge en fonction du temps de pâturage.

Un déprimage efficace permet d’obtenir une herbe de qualité sur une longue période et facilite la gestion des semaines à venir.

Un plan de pâturage prenant en compte les surfaces accessibles et le nombre de vaches pâturant doivent être mis en place. Il doit y être noté le nombre de parcelles, le temps de séjour par parcelle, le temps de repos. A minima on prévoira 7 parcelles de 3 jours, c’est le pâturage tournant. A l’optimum, ceux seront 21 parcelles de 24h c’est le pâturage tournant dynamique.

La valorisation possible sur cette période est 5 kg de MS/j/VL x 30 jours.

 

Pleine pousse

Profiter pleinement de la pousse de l’herbe

Avec un chargement de 4 vaches/ha, soit 25 ares par vache, on peut espérer 50/60 jours avec 100% pâture. 60 kg de pousse de MS journalière couvrent les besoins de 4 vaches sans fourrage à l’auge (15 kg MS/j x 4)

L’arrêt de la complémentation à l’auge doit se réaliser rapidement et permet l’économie de fourrages conservés qui seront les bienvenus en été. La mise en place du pâturage de nuit est la suite logique à cette stratégie de bien pâturer. Il est important de vérifier périodiquement les hauteurs d’entrée dans les parcelles : 12 cm herbomètre et vérifier hauteur de sortie dans les parcelles : 5 cm herbomètre.  Un tour de parcellaire hebdomadaire est un moyen sûr de gestion du pâturage. Sur cette période, il faut avancer vite : 21 jours et laisser 18 jours de repos.

Il est possible de valoriser la pâture à hauteur de 20 kg de lait sans concentrés.

Si la surface accessible est supérieure à 25 ares par vache, il faudra débrayer des parcelles pour diminuer le chargement. Ces parcelles devront rapidement être récoltées pour pouvoir les réintégrer au tour suivant. Un lot de génisses peut aussi suivre les vaches pour consommer ce qui ne l’a pas été et ainsi augmenter le chargement pour l’adapter au potentiel de croissance.

A l’inverse, si la surface accessible est inférieure à 25 ares/VL, une complémentation maitrisée à l’auge devra être conservée.

 

Bien pâturer, c’est aussi accepter les fluctuations de productions journalières.

 

La valorisation possible du pâturage sur cette période est : 10 à 15 kg de MS/j/VL x 60 jours.

 

 

La décroissance

Gérer la phase de décroissance en quantité et qualité

Elle s’étale suivant les secteurs et les années sur la fin du printemps et le début d’été. Elle est très dépendante de la pluviométrie et de l’ETP, et sera donc plus marquée sur les secteurs chauds et secs que sur les secteurs d’altitude.

Il existe un véritable enjeu à maitriser cette phase de décroissance pour allonger la période de pâturage et maintenir un coût alimentaire bas. Elle reste malgré tout compliquée à anticiper notamment si la surface n’est pas agrandissable. Deux principes de pâturage permettent d’optimiser la croissance à cette époque de l’année :

1) l’allongement des temps de repos : avec une croissance plus réduite, il faut en effet plus de temps à la prairie pour atteindre le même volume d’herbe. On visera un temps de repos entre 2 exploitations de l’ordre de 30j. La réintroduction des parcelles de fauche permet d’atteindre cet objectif. Suivant la météo, la surface disponible devra s’approcher des 30 à 40 ares/vl en ration 100% pâture.

2) une sortie de parcelle légèrement plus élevée :   6-7 cm au lieu de 5-6 cm recommandé au printemps permet de favoriser une reprise de végétation plus rapide et puise moins sur les réserves des graminées.

L’irrigation peut pallier au manque de pluviométrie et ainsi limiter la baisse de croissance de cette période.

La valorisation possible est de 5 à 7 kg de MS/j/VL x 30 jours.

 

 

Le creux d’été

Anticiper le creux d’été

On est sur le plein été, la pousse moyenne est faible. Si la surface disponible n’est pas importante (60 à 100 ares par vache sur les secteurs séchants, 40 à 60 ares sur les secteurs les plus arrosés), la complémentation à l’auge sera indispensable. 

Gérer cette période de soudure est primordiale. La distribution à volonté des fourrages permettra de limiter le déficit énergétique des animaux. Il est important de laisser le temps aux animaux d’ingérer la ration et d’adapter le bâtiment aux fortes chaleurs.

Valorisation possible : 0 à 5kg de MS/j/VL x 60 jours

 

Repousses d'automne

Aller chercher les repousses d’automne

La reprise de croissance est variable d’une année à l’autre mais est toujours intéressante à aller chercher. Contrairement aux idées reçues, sa valeur alimentaire est bonne (proche de 0.95 UFL). La mise à disposition de toutes les parcelles pâturables accessibles est une bonne solution. A cette époque de l’année, la senescence est lente, le risque de se faire dépasser est faible, les temps de repos peuvent être encore allongés. Le seul frein peut être la portance et l’arrivée de la neige en montagne. La valorisation des dérobées par le pâturage permet aussi d’augmenter l’autonomie fourragère tout en réduisant les coûts. La ration à l’auge sera adaptée à la stratégie choisie.

La valorisation possible est de 5 kg de MS x 60 jours.

 

Avec une bonne gestion de la pâture, la valorisation annuelle peut facilement atteindre 2025 à 1200 kg de MS/VL selon la zone et la surface disponible. Les stocks sont limités sur la période de mars à octobre.

Les besoins annuels étant 5500 kg MS/VL, un pâturage bien calé peut à couvrir 37% des besoins en fourrages avec un coût réduit.

 

Mickaël Coquard, Rhône Conseil Elevage.

 

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