Pathologies des veaux : en région Auvergne - Rhône-Alpes les veaux sont-ils prêts à affronter l’hiver ?

En élevage laitier, la fréquence d’apparition des pathologies sur les veaux entre 0 et 3 mois constitue un enjeu économique et zootechnique. Les veaux malades nécessitent du temps, de l’argent, sans parler des répercutions que cela peut avoir sur leur croissance, leurs performances futures et leur longévité.

 

 

 

Un groupe technique impliqué, un observatoire mis en place

Les conseillers du groupe génisses FIDOCL ont mis en place un observatoire en fermes, afin d’établir s’il y a un lien ou pas entre l’apparition des pathologies, les conditions climatiques, le confort thermique du veau et les pratiques d’élevage.

Quatorze fermes ont été sollicitées sur l’ensemble de la zone avec, à la clé, une série de mesures et de notations sur la période du 1er décembre 2022 au 31 Mars 2023. L’ensemble des pathologies a été enregistré, une enquête sur les pratiques de chaque élevage a été réalisée, des mesures d’ambiance prises grâce à des capteurs de température et d’hygrométrie installés pour suivre précisément l’évolution des conditions au jour le jour, à la fois dans les nurseries et à l’extérieur, pour être en capacité de mesurer les écarts. Enfin, dans certains cas, un suivi de croissance a été réalisé, de même que le contrôle de la qualité des colostrums

 

Une prévalence des pathologies qui interpelle

 

Sur la période du 1er décembre 2022 au 15 avril 2023, 454 veaux ont fait l’objet d’un suivi.

Le taux de mortalité moyen sur les veaux de 0 à 4 mois est de 11.8 %, ce qui correspond à la moyenne nationale. La moitié de la mortalité se situe dans les 48 premières heures.

La prévalence des pathologies est de 32.2 % en moyenne, avec un taux de pathologies de 7.8 % pour l’élevage qui maîtrise le mieux. Ce taux atteint 65 % de pathologies dans la situation la moins favorable. A noter que chaque élevage, quel que soit son niveau de prévalence, est caractérisé par une pathologie nettement dominante (70%), soit des diarrhées, soit des pathologies respiratoires.

 

Un confort thermique non assuré

Des nurseries trop exposées au froid

Un premier enseignement est qu’il y a globalement peu d’écart entre les températures extérieures et celles relevées dans les nurseries (de 3 à 5°c). Nous avons ainsi relevé des températures intérieures de -1° à 200m d’altitude et de -10° à 1000m. Beaucoup trop loin des recommandations : pour assurer le confort thermique du veau, la température dans l’aire de couchage ne doit pas descendre en dessous de 10°C pour les veaux de moins de 10 jours et 5°C pour les veaux de plus de 10 jours. Ceci explique aussi que le groupe avec pathologies ‟plus” se situe à une altitude qui avoisine les 900 m, contre 500 m pour le groupe pathologies ‟moins”. Les températures y sont plus basses.

 

Des nurseries saturées à 80 % d’humidité

Un autre enseignement de l’observatoire, c’est le taux d’humidité des nurseries, saturé de décembre au 15 février. Cette humidité s’ajoute aux températures trop basses pour créer dans certains élevages des conditions propices à une moindre résistance des veaux, qui vont développer des maladies si de bonnes pratiques d’élevages ne sont pas en place.

 

Les pratiques d’élevages font la différence quand les conditions d’ambiance font défaut

C’est la conclusion de l’enquête des pratiques entre le groupe ‟pathologies plus” et le groupe ‟pathologies moins”. Pour ce dernier groupe, l’encadrement du vêlage et les conditions d’entretien du logement sont mieux maitrisés, complétés par une meilleure qualité des colostrums. (94% des colostrums > 22% de brix contre 50% pour le groupe pathologies « plus »). Les pratiques qui ressortent comme favorables à la maîtrise des pathologies sur les veaux :

◼Privilégier toujours le même intervenant

◼Privilégier un logement individuel au moins pour les 10 premiers jours. Période pendant laquelle le veau est vulnérable et le système immunitaire n’est pas totalement fonctionnel.

◼Respecter un allotement homogène (6 veaux / box)

◼Curer et pailler régulièrement, avec une gestion à la semaine

◼ Adapter sa conduite et ses installations en fonction de l’origine des pathologies :

 

Une non-maitrise des conditions qui conduit à une double sanction, économique et zootechnique

Pour les élevages qui dépassent les 50 % de pathologies, l’impact économique est compris entre 70 € et 100 € / veau, en comptant les traitements et Les coûts de main d’œuvre.

Enfin dernier impact et non des moindres, ce sont les répercussions sur la croissance des veaux avec tout ce que cela implique sur les performances futures et la longévité des animaux. Les mesures de tour de poitrine réalisées dans deux élevages de façon régulière, tous les mois pendant 6 mois (soit 70 veaux), ont permis d’évaluer les conséquences des pathologies.

Si l’impact des diarrhées est moins marquant, les pathologies respiratoires entraînent très souvent des retards de croissance sévères. Ainsi,70 % des veaux qui se positionnent avec les croissances les plus faibles (7cm/mois) ont eu une pathologie respiratoire. Inversement les veaux qui enregistrent les croissances les plus fortes (9.5 cm /mois) sont moins de 30 % à avoir eu un problème respiratoire.

 

Réaliser plus de diagnostic d’ambiance

A l’image des fermes de l’observatoire, l’aménagement des nurseries en Auvergne-Rhône-Alpes ne donne pas souvent entière satisfaction, d’autant moins en zone d’altitude. Des marges de progrès existent sur l’isolation et la ventilation des bâtiments. Un diagnostic d’ambiance peut les mettre en évidence. A défaut, la seule alternative est d’être irréprochable sur les pratiques d’élevage, à moins d’avoir des bâtiments entièrement climatisés adaptés à toutes les périodes de l’année avec une température réglée à 15°c et une humidité à 50 %.

 

Philippe Andraud, EDE Puy-de-Dôme

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