Les leucocytes en troupeaux mélangés : un travail sur l’année

Le vendredi 17 avril a eu lieu à la coopérative de Moutiers une demi-journée technique sur la problématique des leucocytes en troupeaux mélangés. Cette action était à l’initiative de la coopérative Eleveurs des Savoie, en partenariat avec l’Union des Producteurs de Beaufort. L’objectif était de réunir les gérants et adhérents des groupements pastoraux pour échanger sur les pratiques et méthodes mises en place par chacun pour limiter les cellules. Les alpagistes ayant un fonctionnant similaire aux GP : gros troupeaux et main d’œuvre salariée étaient également conviés.

 

Ce fut aussi l’occasion d’une présentation de l’étude réalisée par Estelle Boulu en stage à Eleveurs des Savoie à l’été 2014. Estelle s’est intéressée aux aspects spécifiques aux gros troupeaux mélangés relatifs à la problématique leucocytes. Sans délaisser les « traditionnels » volets techniques (pratiques de traite, machine à traire…) elle s’est plutôt concentrée sur les volets sociaux, tel que la relation entre sociétaires, le management des bergers ou les règles du GP.

 

Un lien évident entre l’hiver et l’été

En préambule, des résultats individuels de GP furent présentés. Grâce au calcul des moyennes mensuelles des VL d’un même groupement sur chaque mois, y compris ceux d’hiver, on parvient à observer le comportement de celui-ci sur l’année. Sur la vingtaine de courbes annuelles présentées, on matérialise très bien le lien entre les saisons, notamment la montée inéluctable des niveaux en été (voir graphique). L’analyse fine confirme que la montée l’été est d’autant plus importante que l’on est haut l’hiver. On observe par exemple qu’aucun GP n’arrive à finir la saison sous les 400 000 leucocytes s’il n’est pas sous les 150 000 l’hiver. Aussi, tous les GP ayant des niveaux leucocytaires supérieurs à 200 000 l’hiver finissent l’été, dans le meilleur des cas, aux alentours de 600 000 mais bien souvent au-dessus.

 

Monter un troupeau sain

Sont ensuite présentées les conclusions de l’étude de l’été 2014. Quelles sont les moyens et méthodes dont dispose un GP pour diminuer ses moyennes leucocytaires ? Bien que les problèmes surviennent plutôt en fin d’alpage c’est bien un travail sur l’année qu’il faut réaliser.  

 

D’abord, il s’agit de tout faire pour monter un troupeau le moins infecté possible. Pour cela, il faut une prise de conscience de chacun que le succès de l’été dépend des performances de l’hiver. On observe que les groupements qui arrivent à sensibiliser tous leurs sociétaires aux problèmes leucocytes améliorent leurs résultats. La transparence des résultats de chacun, poussent les éleveurs à s’appliquer l’hiver pour présenter des animaux les plus sains possible au printemps. Des réunions avant l’emmontagné où sont discutées les conditions d’admission des VL sur l’alpage peuvent être envisagées. Certains groupements poussent même la transparence au maximum en se présentant leurs résultats contrôle laitier et en discutant sur les animaux à problème. D’autres, fixent un seuil leucocytes limite sur quelques contrôles, au-delà duquel les vaches ne sont pas acceptées dans le GP.

 

Sensibiliser les bergers à la thématique leucocyte

Ensuite, il convient d’assurer une continuité entre les saisons, pour cela il est nécessaire que les bergers soient sensibilisés au problème. Leur expliquer les enjeux, les inviter aux réunions d’avant emmontagnée, faire des points réguliers en cours d’alpage, leur transmettre les résultats VL/VL dès que possible sont autant de points profitables. L’enjeu est de tout faire également pour garder des bergers motivés et attentifs à la traite. Globalement les bonnes pratiques de traite sont connues mais leur application reste variable et a tendance à se dégrader au cours de la saison. L’étude a mis en évidence que beaucoup de facteurs influent sur la performance des bergers. Des facteurs directs comme l’équipement de la machine à traire, la taille du troupeau, le temps de traite mais également des facteurs, à priori moins liés à la problématique, mais qui peuvent jouer sur l’état de lassitude générale. (Confort du chalet, nourriture, entente de l’équipe…)

La matinée s’est terminée par le témoignage d’un membre de GP. Il a expliqué à l’assemblée les moyens mis en place sur son alpage, suite à une année où les pénalités leucocytes avaient trop fortement pesé sur le résultat économique. Comptabilité sur 3 ans à l’appui,  tout le monde a alors pu juger de l’efficacité des mesures mises en place !

Pour conclure, et on l’a bien compris, toutes ces pratiques demandent un certain investissement et comme souvent, il s’agit de trouver les meilleurs compromis : Mettre le prix pour fidéliser un berger, refuser des vaches au risque de ne pas faire son quota, passer du temps en réunion aux dépens d’autres activités… Il ne faut cependant pas oublier de peser les conséquences plus indirectes des problèmes leucocytaires en alpage tel que la baisse de production individuelle, le déclassement des fromages, les frais sur les médicaments, les pénalités en automne ou encore l’impact global sur la filière.

Fréderic PERRIN, Eeveurs des Savoies

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