Le bâtiment, lieu d'expression du potentiel des chèvres

Conduire un cheptel et obtenir de bonnes performances de production ou de croissance implique de préserver la bonne santé des animaux. Or la santé est étroitement liée aux conditions de milieu dans lequel évolue l’animal.

 

Se mettre à la place de la chèvre

 

Aujourd’hui encore, de nombreux éleveurs sous-estiment l’impact du milieu sur l’expression du potentiel génétique. Ce paramètre offre pourtant de réelles marges de progrès, facilement accessibles. Pour bien comprendre, il suffit de se replacer au niveau de l’animal et de son logement. Comme tout être vivant, une chèvre, une brebis, un veau, une vache va polluer le milieu dans lequel il évolue, en rejetant de la vapeur d’eau, du gaz carbonique, de l’ammoniac… On dit alors que la pression infectieuse du milieu de vie augmente, par l’accumulation de ces polluants au fil du temps. Le milieu perd de sa salubrité. Il peut même favoriser l’apparition de pathologies, comme les maladies respiratoires, les diarrhées néonatales, les mammites, les boiteries… L’expression du potentiel de l’animal est alors affectée.

 

 

 

Les points clefs pour une bonne ambiance de bâtiment

La température est optimal autour de 12 °C, et tolérable jusqu’à 27 °C. Quant à l’humidité, il faut savoir qu’une chèvre évapore 1,2 à 1,5L/jour ; à cela il faut rajouter les urines qui s’évaporent des litières. Il ne faut donc pas excéder une humidité relative de 80% dans le bâtiment d’élevage. Une bonne isolation permet de limiter le phénomène de condensation et de gros écart de températures.

Pour limiter les dégagements d’ammoniac, un curage régulier tous le 1,5 mois doit être réaliser. Ces dégagements peuvent créer des problèmes respiratoires aux cabris comme aux chèvres.

Pour la ventilation, naturelle ou mécanique, le renouvellement de l’air doit être de 30 m3/heure/animal l’hiver et 120 à 150 m3 l’été. Et la vitesse de l’air ne doit pas dépasser 0,5 m/s au niveau des animaux adulte et 0,25 m/s pour le renouvellement.

 

Jean François MERMAZ Coopérative Eleveurs des Savoie

 

« GAEC Le Clos aux chèvres, Saint Jean d'Aulps (73)

Une mauvaise ambiance ? De moindres performances !

Le Gaec Le Clos aux Chèvres a réalisé un diagnostic d’ambiance de bâtiment suite à des soucis sanitaires en hiver. L’appui d’un technicien spécialisé a permis de mettre en évidence un problème de circulation d’air et d’y remédier rapidement.

 

 

Carte identité de l’exploitation :

  • GAEC 2 associées, mère & fille
  • St Jean d’Aulps, commune située à 1 000 m d’altitude
  • 8 ha de pâtures, 3 ha de fauche
  • 80 chèvres Alpines, 20 chevrettes, pratique de  l’Insémination Animale et adhérent Contrôle Laitier
  • Stabulation en aire paillée, 110 places au cornadis, grange en prolongement, salle de traite
  • Mises-bas saisonnées
  • 50 000 litres/an transformés en Chevrotin AOP, Tomme, Sérac, Yaourt, Flan
  • 10 porcs plein air/an
  • 50 % en vente directe (marchés, Amap), 50% en supermarchés, restaurants

 

 

 

 

Depuis combien de temps l’exploitation adhère au contrôle de performances ? Quels étaient les objectifs ?

L’exploitation fait appel au contrôle de performances depuis 5 ans maintenant.

Notre objectif était de connaitre et d’améliorer la qualité de notre lait, nous souhaitions augmenter nos performances laitières. Nous avions notamment des taux faibles et parfois inversés. Par ailleurs, le diagnostic de la technicienne a révélé que les chevrettes avaient un poids trop faible à la mise à la reproduction. C'est le premier chantier que nous avons mené ensemble, le résultat fut sans appel. En une année, l'objectif de poids était atteint grâce à une ration bien adaptée aux chevrettes et une surveillance des poids de croissance régulière.

En 2014, nous avons combiné à ce premier travail l’insémination, avec l'intention d'améliorer le potentiel de notre troupeau.

 

Comment êtes-vous arrivés à travailler sur le problème d’ambiance de bâtiment?

A l'occasion d'une visite en hiver, la conseillère en élevage en entrant dans le bâtiment d’élevage, m'a fait remarquer que la forte odeur d’ammoniac n'était pas normale. Nous avions à cette époque-là un problème de toux récurrent sur l'ensemble du troupeau et n’arrivions pas à en déterminer la cause. Le bâtiment était fermé pour préserver la chaleur mais l’air s'en trouvait complètement saturé.

La conseillère m’a alors mis en contact avec le technicien ambiance et bâtiment. Il est intervenu rapidement : le problème venait d’une absence de ventilation. Le bâtiment avait été conçu pour être ventilé de façon naturelle par les vents dominants or le renouvellement d’air était inexistant. Sur ses conseils, nous avons opté pour la mise en place d’une ventilation mécanique. Nous l’avons installée en janvier et nous avons constaté une nette amélioration de la santé des chevreaux et des démarrages de lactation dès le mois de février (avec la même ration). Aujourd’hui, aucune chèvre adulte ne tousse, le foin ne moisit plus, et la litière reste sèche. L’ambiance faisait partie de nos facteurs limitants, nous sommes parvenus à régler le problème de fond.

 

 

 

Quels sont vos projets pour le futur ?

Nous avons amélioré la qualité d’ambiance, la génétique et les performances du troupeau : nous avons désormais toutes les clés en main pour optimiser nos résultats. Car, nous savons que notre troupeau est capable de mieux! La marge de progrès est énorme! Nous réfléchissons par exemple à l’aménagement d’une nurserie; ce serait en effet idéal de pouvoir séparer l’élevage des jeunes des chèvres laitières et nous comptons sur l’aide du technicien ambiance et bâtiment ! ».

 

 

Regard de l’expert – Jean-François MERMAZ

Le bâtiment est souvent le milieu de vie principal des troupeaux. Sa conception doit impérativement inclure une bonne aération. La chèvrerie du Gaec le Clos aux chèvres ne bénéficiait pas d’un flux d’air efficace, capable d’assainir l’air ambiant. Le logement était bien équipé de cheminées, mais les entrées d’air étaient insuffisantes. Le renouvellement d’air était déficient. De plus l’orientation et l’exposition du local, par rapport au vent dominant et à l’ensoleillement ne permettait pas d’exploiter au mieux la ventilation naturelle. Enfin l’altitude du site (1000 m) pouvait induire de forts écarts de température et de l’inconfort pour les animaux. Le bilan du diagnostic d’ambiance a finalement conduit à opter pour l’installation d’une ventilation mécanique. Cet équipement a permis d’optimiser le renouvellement d’air sur l’aire de vie des chèvres 24h/24h, tout en assurant un confort aux animaux. Je crois que le choix était judicieux, les résultats zootechniques le montrent et finalement les travaux nécessaires sont restés limités.

 

Propos recueillis par Hélène Jolais – Eleveurs des Savoies

 

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