GAEC Les Cabrettes, au pays du Mont Blanc

Le GAEC Les Cabrettes est situé en Haute-Savoie sur la commune de Sallanches, au carrefour de plusieurs massifs alpins : le massif de Faucigny à l’Est, le massif des Aravis à l’Ouest et le prestigieux massif du Mont Blanc du Sud à l’Est. Sallanches compte plus de 16 000 habitants et est un grand bassin de consommation. C’est un lieu de passage pour se rendre à Chamonix et en Italie. La ville est également à proximité de plusieurs stations (St Gervais, Megève,…) et de sentiers de randonnées.

 

 

Le siège de l’exploitation est placé sur les hauteurs de la commune au lieu-dit "Le Fresnay" sur les pentes du sommet des « Quatre Têtes », où les 3 associés font pâturés les chèvres et produisent une partie du foin.

 

Une histoire de famille…

Issu d’une famille d’éleveurs de chèvres et de vaches laitières, Denis Ballet-Baz gardait les chèvres étant plus jeune. Il conservera cet atelier tandis que son frère poursuivra l’élevage des vaches. En 1986, Denis a construit le bâtiment actuel et s’est installé seul avec 80 chèvres. Les frères se retrouveront les étés à l’alpage de Doran sous la Pointe Percée.

En 1998, Denis embauche Dominique Joulot en tant que salarié. Dominique, ancien cuisinier, est en reconversion professionnelle. Le 1er janvier 1999, le GAEC les Cabrettes est créé. Les 2 associés procèdent à des aménagements de bâtiments afin d’augmenter le troupeau de 20 chèvres supplémentaires.

10 ans plus tard, en 2009, c’est la sœur de Denis, Marie-Hélène qui rejoindra le GAEC. Son projet d’installation visera à développer l’accueil à la ferme avec des goûters et visites.

Les frères développant leur élevage respectifs, l’alpage de Doran ne suffit plus pour nourrir l’ensemble des animaux durant l’été. A partir de 2009, le GAEC des Cabrettes passera les saisons d’été sur l’alpage communale de Sommier d’Aval au Reposoir.

Depuis l’enfance, le neveu de Denis et Marie-Hélène, Tony, est intéressé par les chèvres. Régulièrement, il passe du temps au GAEC des cabrettes. La retraite de Dominique et Marie-Hélène approchant, Tony souhaite s’investir dans l’élevage et intègrera le GAEC en 2023. 

 

Entre répartition des tâches et polyvalence

Chacun des associés a ses activités de prédilection. Denis gère le troupeau : alimentation, élevage des chevrettes, gestion du pâturage…. Dominique est davantage sur la partie fabrication. Toutefois, ils peuvent se remplacer facilement.

Le lait est fabriqué matin et soir afin de produire du chevrotin (90 %), un peu de tomme et du serac. Ce dernier permet de valoriser les protéines du lait qui sont encore présentes dans le sérum.

Marie-Hélène s’occupe de la valorisation des produits à travers l’affinage des fromages en cave, des livraisons et est présente sur les marchés. Enfin, elle accueille les clients pour transmettre la passion à travers les visites et goûters.

Le GAEC a plusieurs débouchés pour ses fromages. La vente directe permet de valoriser 1/3 des chevrotins à 6,30 € la pièce (soit 23 €/kg). 1/3 des chevrotins sont livrés à des crèmeries à 18 €/kg. Le reste est vendu en blanc à des affineurs autour de 13 €/kg.

Enfin tous les trois se relayent pour la traite matin et soir.

Actuellement, les associés transmettent leurs connaissances à Tony qui est intéressé principalement par la gestion du troupeau. Ayant moins d’expérience en fromagerie, il apprendra les secrets de la fabrication du chevrotin afin de perpétuer la renommée du GAEC.

 

L’AOP Chevrotin

L’AOC Chevrotin, existant depuis 20 ans, est 100% fermier. 25 exploitations agricoles et 5 affineurs produisent et/ou affinent plus de 80 tonnes de fromages chaque année. Plus de 70% des producteurs montent en alpage.

Les points importants du cahier des charges au sujet de la conduite d’élevage :

o   Au min. 80 % des animaux du troupeau d’une exploitation doivent être de race Alpine ou race de Chèvre de Savoie

o   La production moyenne par chèvre est plafonnée à 800 kg/lactation

o   L'éleveur dispose d'une surface minimale de 1 000 m² de pâturage/chèvre, situé dans l'aire géographique

o   Au moins 5 mois par an de pâturage

o   L’alimentation concentrée est limitée en quantité à 300g/kg de lait

o   70 % du fourrage en matière sèche est issu de la zone. L’utilisation de fourrages extérieurs à l’aire géographique est autorisée pour le foin, les pulpes de betteraves et la luzerne déshydratées.

La filière est caractérisée par un dynamisme fort, chaque année plusieurs producteurs s’installent en Chevrotin.

 

Système de production : le cahier des charges comme ligne directrice

Les chèvres du GAEC pâturent environ 6 mois par an dont 3 à 4 mois en alpage. Selon les périodes de l’année et les besoins des chèvres, la ration est composée de fourrages (Herbe pâturée, foin et regain de pays, foin de Crau et de luzerne) et de concentrés (maïs, tourteaux).

La conduite alimentaire du troupeau

 

Le troupeau est sélectionné en fonction de critères ayant une importance pour le Chevrotin. La capacité des chèvres à s’adapter au système d’élevage et notamment aux conditions d’alpage est indispensable. A partir des résultats du contrôle laitier, les associés ont pu sélectionner les chèvres en fonction de leur rendement fromager, c’est-à-dire leur production laitière sur la lactation mis en parallèle de leur taux (TP et TB). Depuis 2016, leur TP a pu augmenter (+ 2 points) et la production laitière rester globalement stable (env. 600 kg/chèvre/lactation).

 

Ces choix d’élevage valorisent un territoire de montagne tout en produisant un lait de qualité. Le partage de leur fonctionnement avec les consommateurs permet d’améliorer l’image du métier d’éleveur. Certaines contraintes peuvent exister notamment en alpage où les chèvres sont soumises à la prédation (vipères, loups) et aux conditions climatiques qui peuvent être rudes selon les années.

 

Transmettre le savoir-faire du chevrotin

A l’époque où on ne l’appelait pas encore chevrotin, les parents de Denis produisait un « Reblochon de chèvre », un fromage à pâte pressée non cuite et à croûte lavée. Cette dernière était essuyée avec un torchon. Ces secrets de fabrication ont été transmis à Denis et ses associés qui vont les enseigner à Tony. Ce savoir-faire est important pour la filière. Ainsi Denis a choisi de s’investir en tant que président du syndicat du Chevrotin.

Au sein de la filière, il est reconnu que la fabrication du chevrotin est délicate, ce dernier étant sensible aux modifications de qualité du lait et à l’environnement. L’obtention d’une régularité de la texture du fromage nécessite de l’expérience et du savoir-faire.

Le GAEC des Cabrettes transforme le lait deux fois par jour afin d’obtenir des chevrotins plus homogènes. Une seule transformation diminue les rendements et rallonge la transformation. Les premiers fromages moulés n’ont pas la même texture que les derniers. Le GAEC a eu plusieurs reconnaissances pour son savoir-faire et ses chevrotins en 2022 : 1er prix au concours de fromages de Faverges dans le cadre du Printemps des Chèvre ainsi qu’une médaille d’or au Concours Général Agricole de Paris.

Dicton de Denis : « c’est en étant rigoureux et soigneux sur la qualité du lait qu’on a un fromage de qualité ». Pour l’éleveur, on ne peut pas avoir un bon fromage sans un lait de qualité. Cela commence donc par l’alimentation distribuée, se poursuit à travers le soin et la propreté de la traite et se termine dans une salle de fabrication propre où seuls les micro-organismes indispensables à la production de fromages ont leur place.

Au sein de la filière, afin de motiver les nouveaux installés, il est organisé 2 fois par an une journée « Autour du chaudron » où une thématique particulière de la fabrication du Chevrotin est abordée. C’est l’occasion pour les différents producteurs de se retrouver, de partager des « trucs et astuces » et d’échanger autour de problématiques.

C’est à travers ces rencontres que l’on se rend compte de l’importance de la transmission de connaissance, c’est ensemble que les fromagers fermiers progressent au sein de la filière du Chevrotin.

 

Marie Wirth, Eleveurs des Savoie

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