Cap'Climat, ou la recherche de solutions face au changement climatique

Cap’climat territoires : Les éleveurs caprins Drôme-Ardéchois cherchent des solutions locales face au changement climatique.

 

Ce projet, financé par l’Anicap et animé par l’institut de l’élevage, a pour objectif de faire émerger localement des solutions d’adaptation au changement climatique des élevages caprins ainsi que d’atténuer leur impact. Les thématiques abordées découlent des scénarios climatiques locaux et de leurs impacts sur le système fourrager, le stress thermique en bâtiment, la reproduction... Les éleveurs décident eux-mêmes des thématiques importantes à traiter. Le format des réunions allie apports techniques, échanges d’expérience, simulation et jeux de carte des leviers. Sept groupes d’éleveurs ont été mis en place sur le territoire français pour coconstruire des systèmes adaptés au changement climatique.

Ce projet s’est décliné en 2 groupes en Auvergne-Rhône-Alpes : un groupe dans la Drôme et un en Nord Ardèche.

Les échanges, coanimé par l’institut de l’élevage et Adice, ont débuté par des projections climatiques sur les 2 départements. Des scénarios qui annoncent des années futures avec des jours de canicules bien plus nombreux, une pluviométrie annuelle identique mais une répartition des précipitations beaucoup plus chaotique. Ces projections indiquent qu’il faut s’attendre à une augmentation de la production herbagère avec un démarrage plus précoce au printemps, un déficit plus marqué en été et une reprise plus importante et plus tardive à l’automne (Figure 1). Ces scénarios révèlent également une succession d’années atypiques qui rendrait difficile la valorisation de l’herbe disponible.

En partant de ce constat, les éleveurs ont imaginé les mesures qu’ils pourraient mettre en place en cas de successions d’années défavorables concernant la pousse de l’herbe et les conditions de récolte.

Un levier commun identifié autour de la question de l’autonomie fourragère : la gestion de la trésorerie fourragère

Grâce à des intervenants spécialisés sur la question des fourrages, des simulations et des retours d’expériences, les éleveurs ont pu réfléchir à différents leviers autour de la gestion de leur trésorerie fourragère pour faire face au changement climatique.

 

Des éleveurs qui s’adaptent déjà à leur échelle

La plupart des éleveurs mettent déjà en place des pratiques face aux années irrégulières en termes de qualité et de quantité de fourrage, notamment autour de la gestion des stocks. Certains ont investi dans des bâtiments de stockage pour avoir la capacité de garder plus de fourrages et dans de bonnes conditions. L’objectif est de toujours avoir un stock d’avance de 6 mois. Cela demande aux éleveurs d’anticiper, notamment pour les achats, afin d’assurer une certaine qualité à un prix acceptable. Cette pratique nécessite également d’avoir la trésorerie disponible, ou le cas échéant certains éleveurs recommandent de faire des prêts à court terme.

Concernant les achats de fourrage sur pied ou en botte, la solution de la contractualisation permet de sécuriser l’approvisionnement. Pour privilégier la qualité, certains éleveurs vendent les 1ères coupes ce qui leur permet d’acheter de meilleurs fourrages.

 

Quels leviers actionner pour une meilleure autonomie fourragère ?

Grâce au jeu de cartes collaboratif Lauracle, les éleveurs ont aussi réfléchi aux leviers qu’ils n’utilisent pas mais qui leurs paraissent envisageables (Figure 2). Parmi les leviers qui concernent le troupeau, ils prévoient de réformer plus tôt les chèvres vides afin de limiter le nombre d’animaux improductifs dans le troupeau.

Pour les élevages désaisonnés, il a été évoqué le fait de garder moins de chevrettes en fonction des stocks de fourrage de l’année, mais cette solution implique de diminuer son renouvellement et/ou son nombre de réforme. Il est donc nécessaire de mesurer les répercussions que peut entrainer cette décision pour le troupeau.  

Enfin, pour les élevages mixtes, le fait de moduler les effectifs de l’atelier allaitant en faisant plus ou moins d’engraissement permettrait de gérer au mieux le moins bon fourrage.

Concernant les surfaces, des éleveurs réfléchissent à augmenter la part de SFP dans la SAU et, lorsque c’est possible, d’augmenter la SAU de l’exploitation pour gagner en autonomie. Ce levier implique tout de même d’avoir des terres disponibles, mécanisables, avec le potentiel nécessaire et la main d’œuvre suffisante.

 

Des mesures non envisageables pour les éleveurs des groupes

Certains leviers proposés semblent difficilement applicables. Par exemple, le fait de diminuer le nombre de chèvres du troupeau en cas de stocks insuffisants auraient trop de répercussions négatives qui ne compenseraient pas le fait de pallier le manque de fourrage. En effet, pour les éleveurs il est plus intéressant d’optimiser sa chèvrerie en la remplissant car le lait de chèvre est bien payé, même si cela implique de diminuer son autonomie fourragère.   

Enfin, le levier qui consisterait à faire de l’enrubannage pour simplifier la fenaison des premières ou dernières coupes de fourrage n’est pas envisageables pour certains éleveurs du groupe qui sont dans l’AOP Picodon car le cahier des charges ne le permet pas.

 

Des échanges qui continuent grâce à la mise en place d’essais locaux

Afin de continuer l’échange d’expérience, des essais ont été mis en place par les éleveurs. Pour gérer le manque d’herbe d’été et éviter d’utiliser son stock de fourrage sec à cette période, un éleveur a planté de la chicorée pour la faire pâturer par ses chèvres (Figure 3).

Une autre éleveuse a mis en place le pâturage pour ses chèvres depuis 2 ans à la suite d’une augmentation de sa SFP. Un suivi de la pousse de l’herbe et du parasitisme est réalisé cette année sur la période de pâturage. Les retours de ces expériences auront lieu durant l’été.

Les troisièmes réunions des groupes auront lieu cet automne. Les éleveurs du groupe Drôme vont travailler sur les rotations possibles (fourrages et culture) pour faire face au changement climatique. Les éleveurs du groupe Ardèche vont eux plutôt travailler sur le stress thermique des animaux, son impact sur la reproduction et les adaptations possibles des bâtiments.

 

Premiers retours et communication attendus lors des JPO du Pradel mi-octobre

Pour suivre les publications sur le sujet : Instagram : @capclimat_territoires, Facebook : groupe public Cap’Climat.

 

Mathilde Chazalet & Priscilia Crouzet, ADICE Conseil Elevage

Tags: