Bilan de la saison de pâturage 2018

Le pâturage a la côte ! En plus d’offrir un aliment équilibré en énergie et en azote, le pâturage est également économique. Mais est-ce que ces espoirs de faibles coûts de production se vérifient même en année d'accident climatique ? Les enregistrements des élevages ayant pratiqué le pâturage en 2018 nous permettent de faire l'analyse des résultats et de porter un regard global sur l'intérêt de cette technique.

 

 

Le traitement des données

Depuis plusieurs années, les éleveurs qui le souhaitent, peuvent valoriser les données techniques de suivi de pâturage à travers des outils développés par Acsel Conseil Elevage. En 2018, 24 bilans ont été réalisés, soit plus du double qu’en 2017.

Les élevages qui ont réalisé les enregistrements se situent en Bresse, en Dombes et sur le secteur de la Montagne. Ils sont représentatifs des élevages de ces zones.

Le nombre moyen de vaches par élevage est de 65, avec une amplitude de 30 à 112. La production moyenne des élevages est de 22 kg de lait par jour et par vache traite durant la période de pâture.

Les graphiques ci-dessous présentent les résultats des élevages étudiés. Ces résultats sont classés de la façon suivante :

  • Les élevages de 1 à 9 sont en zone montagne
  • Les élevages de 11 à 24 sont en zone de plaine (Bresse et Dombes)

Les élevages de 3 à 17 sont en système Pâturage Tournant Dynamique (= technique de gestion du pâturage consistant à mettre à disposition aux animaux une parcelle différente par jour pendant un cycle d’au moins 21 jours. Ceci dans le but d’optimiser la repousse et d’améliorer la qualité de l’herbe présente.)

 

Organiser l'espace de pâturage disponible

 

 

Le pâturage est une technique de valorisation des espaces prairiaux. En moyenne, 25 ha sont dédiés au pâturage sur le secteur de la montagne contre 18 ha en plaine. Ainsi, les surfaces valorisées en pâturage sont plus importantes en zone de montagne. La croissance de l’herbe est plus limitante qu’en plaine, du fait, entre autre, de l’importante part de prairies naturelles dans la SAU.

A noter que les élevages en système dynamique (PTD) valorisent 23ha en moyenne.

Ces surfaces dépendent de la disponibilité des parcelles de la SAU mais aussi, du nombre d’animaux à nourrir au pâturage.

 

 

Le chargement en ares / vache / jour est un indicateur de l’intensification de la gestion de l’herbe et de la part d’herbe pâturée entrant dans la ration. En montagne, la ration est principalement herbagère. La surface disponible par animal est donc relativement importante ; de l’ordre de 46 ares/VL/jr. Tandis qu’en plaine, le chargement est de 25 ares/VL/jr Ce qui est plutôt limitant durant les périodes de sécheresse. Les systèmes dynamiques sont plus extensifs avec une moyenne de 38 ares/VL/jr dédiés au pâturage.

Quelque soit la technique choisie, il faut mettre à disposition les surfaces nécessaires par vache en fonction des potentialités des sols, des plantes installées, de l'itinéraire technique et du climat.

En 2018, la croissance a été de courte durée, avec une sécheresse et une canicule de juin à octobre (croissance nulle dès le 15/07/18 d'après les relevés PatuRA effectués sur les secteurs de la Bresse, Dombes et Montagne).

 

Gérer le rythme de passage 

La fréquence de retour sur une parcelle est un facteur clé de la qualité de la repousse. Les meilleurs résultats sont obtenus en évitant le surpâturage et en respectant les temps de repos entre chaque cycle. Il faut également que les vaches consomment l’herbe offerte et donc éviter les refus. Pour ce faire, il est nécessaire que les vaches aient faim lors de la mise au pré. 

Durant la période de sécheresse de 2018, il était préférable de complémenter les vaches à l'auge pour éviter le surpâturage et pour limiter la perte d'état des animaux. Lrs vaches pâturant trop ras entrainent un épuisement des plantes et une baisse de la productivité. En effet, les plantes ont besoin de leur système foliaire pour faire de la photosynthèse et reconstituer leurs réserves. Sans feuilles, la plupart des plantes sont vouées à disparaître. C'est alors qu'on observe un appauvrissement des prairies et uen repousse de plus en plus lente.

Le temps de repos entre chaque passage du troupeau influe également la croissance. Un temps de repos de 20 jours est nécessaire en période favorable (printemps), tandis qu'il faut un temps de repos d'une quarantaine de jours en période défavorable (été). Ainsi, il faut ajouter de la surface pâturable accessible aux animaux dès que les températures grimpent. Aussi, durant les péiodes de fortes chaleurs, il était conseillé de rentrer les animaux durant la journée pour les laisser "au frais" et de les sortir la nuit. L'objectif étant que les vaches puissent ingérer le maximum d'herbe en un minimum de temps.

Un élevage atteint même plus de 6,6 T de MS / ha valorisées par les vaches.

 

Le rendement obtenu par hectare de pâturage est exprimé en kg de Matière Sèche (MS). Les fauches réalisées ou la pâture par d’autres catégories d’animaux (taries, génisses) ne sont pas prises en compte dans le calcul de ce rendement.

Les différences de rendement entre chaque élevage s’expliquent par la différence de surfaces disponibles, la part d’aliments fourrages apportés à l’auge, le type de prairie et le mode de gestion de l’herbe.

Les 12 élevages en gestion pâturage dynamique ont eu un meilleur rendement à l’hectare (+125 kg de MS en moyenne). Ce sont de bons résultats compte tenu des conditions météo de 2018. Un élevage atteint même plus de 6,6 T de MS / ha valorisées par les vaches.

 

Valoriser l'herbe en lait pour rentabiliser les hectares disponibles

L’enregistrement des données concernant la ration distribuée permet de calculer la part de lait produite avec les fourrages et les concentrés distribués à l’auge. Puis, en se basant sur la production des vaches, les besoins d’entretien et les besoins d’énergie (UFL) nécessaire pour produire 1kg de lait, nous retrouvons la part d’herbe valorisée en lait. 

Sur le graphique ci-dessus, se retrouvent la part de chaque aliment dans la ration pour l’ensemble de la saison de pâturage (Compléments = affouragement en vert, foin ou autres fourrages …). La part de lait produit par la pâture varie entre 16 et 80 % entre les différents élevages évalués. Ceci est principalement lié au chargement disponible par vache mais également à la gestion de l’herbe. Les élevages qui ont une petite surface disponible pour pâturer ne peuvent avoir une forte production de lait avec l’herbe. Les élevages de montagne et en système pâturage dynamique produisent la moitié du lait grâce à l’herbe pâturée. Le coût d’exploitation de la pâture est moins cher que celui des concentrés achetés et des fourrages conservés. En effet, il est de l’ordre de 42 €/T MS pour la pâture contre 104€ /T MS pour l’ensilage de maïs et 105€/T MS pour le foin bottes. Avec envie et technicité, d’importantes économies sont possibles grâce à une bonne gestion du pâturage.

La quantité de lait produite grâce à chaque hectare pâturé dépend de la productivité des animaux et de la bonne exploitation des surfaces. En montagne et système foin, la moyenne par vache est plus faible de 2000 kg par rapport aux systèmes ensilages. Une bonne exploitation a permis malgré les conditions climatiques, de bons rendements, à plus de 7000 kg de lait par hectare dans les élevages de montagne (n° 1 à 9).

 

 

Une année climatique favorable au pâturage en 2019 n’est pas garantie. Mais il est possible de mettre en place des pratiques et des découpages de parcelles pour améliorer la gestion et la valorisation du parcellaire pâturé.

Parlez-en avec votre conseiller(ère) !

 

Résultats du suivi « Pâturage » au GAEC des Tilliets

Le GAEC des Tilliets, fait partie des élevages de ce bilan.

Les éleveurs ont décidé de mettre en place le pâturage tournant dynamique avec un troupeau de 85 vaches laitières sur des prairies à la fois naturelles et temporaires (type mélange suisse). Le pâturage tournant a également été mis en place pour les 70 génisses de l’élevage (57UGB) avec des parcs d’une semaine.

La gestion du pâturage a été suivie mensuellement par les conseillers d’ACSEL Conseil Elevage. L’observation des paddocks a permis une meilleure gestion de l’herbe avec une rotation adaptée à la repousse de l’herbe et à la flore installée. Ceci a permis d’éviter le surpâturage : « On n’a pas eu de surpâturage contrairement aux années précédentes». Aussi, des parcelles ont pu être débrayées au printemps, augmentant ainsi les stocks de foin. Les observations étaient appuyées par des mesures d’herbomètre.

Les résultats obtenus dans le bilan de pâturage montrent que la gestion du pâturage a été optimisée. En effet, le rendement des prairies pâturées est de l’ordre de 4,5 TMS/ha, avec une production de lait réalisée à 80% à base d’herbe, proche de l’objectif des 90% fixé par l’éleveur. Aussi, l’éleveur a observé une baisse des refus et une meilleure ingestion au pâturage : « Les pâtures sont de meilleure qualité depuis que j’ai commencé le pâturage tournant dynamique, sachant que je n’ai rien changé d’autres dans mes pratiques. Aussi, les vaches mangent mieux certaines parcelles ».

Suite à ce bilan et aux observations menées durant les visites, des préconisations ont été données, notamment en terme de fertilisation. Car bien que la gestion du pâturage puisse améliorer la repousse de l’herbe, les prairies qu’elles soient naturelles ou temporaires, ont besoin d’être fertilisées et parfois chaulées (fonction du pH du sol) pour qu’elles expriment leur véritable potentiel !

 

Anne Blondel, Camille Satre et l’équipe de conseillers(ères) Acsel Conseil Elevage

 

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