Bien penser son projet bâtiment

Un projet bâtiment et sa projection économique nécessitent une réflexion approfondie. Les choix faits au départ vont impacter durablement les performances des animaux, le travail des éleveurs, les coûts de fonctionnement et au final, les résultats économiques de l’exploitation.

De nos jours, les bâtiments d’élevage sont au cœur des enjeux majeurs de l’élevage. Leur emprise physique et le regroupement des animaux et des hommes en un point du territoire créent des préoccupations environnementales incontournables. Le bien-être animal et la productivité du travail sont aussi à bien intégrer à la conception des bâtiments d’élevage puisqu’ils seront des facteurs de qualité de vie et de pérennité des exploitations.

De plus, l’incertitude des marchés agricoles pèse dans les choix décisionnels des exploitants agricoles. Tout changement est une prise de risque, l’essentiel est donc d’avoir des repères pour que le projet bâtiment soit un facteur de développement de l’exploitation agricole. Ainsi aujourd’hui et plus encore à l’avenir, les choix et compromis auxquels les éleveurs sont confrontés dans la conception et l’utilisation de leur bâtiment doivent viser à assurer la durabilité de leur système d’exploitation.

 

Le bâtiment d’élevage est un lieu de vie, un outil de travail et un espace organisé

Lors de la conception d’un bâtiment d’élevage, il est nécessaire de rechercher l’efficacité de cet outil de production. Il doit être, avant tout, adapté au système de l’exploitation et aux objectifs des éleveurs. Le bâtiment d’élevage doit prendre en compte le fonctionnement fourrager de l’exploitation : pendant combien de temps les animaux pâturent ? Quelle est la dispersion du parcellaire, est-ce que de la paille est produite sur l’exploitation  et en quelle quantité ? Quels sont les besoins en termes d’effluents ?

La prise en compte du bien-être animal est tout aussi importante que les conditions de travail des éleveurs. Le bâtiment d’élevage est un outil de travail duquel dépend la productivité du temps de travail. Il est nécessaire d’étudier les circuits des animaux, des hommes, des fourrages, du lait et des déjections. 

Toutes ces questions sont indispensables pour que la conception d’un bâtiment et/ou son aménagement soient cohérents avec le fonctionnement de l’exploitation.

 

Coût d’investissement/ coût de fonctionnement : à la recherche du bâtiment économe

Lors de la réflexion du projet bâtiment et de sa conception, le coût d’investissement et le coût de fonctionnement doivent être étudiés parallèlement. En effet, un bâtiment est à la fois un outil de production et un générateur de charges qui impactent le revenu des exploitants.

Le coût d’investissement est aujourd’hui très variable d’une région à l’autre. Afin de le réduire, il est important d’envisager la valorisation du bâti existant, même lors d’une construction neuve, car il peut être affecté à un lot d’animaux (génisses) ou à une activité (engraissement). Les choix techniques réalisés lors de l’investissement auront des conséquences sur le fonctionnement du bâtiment. La prise en compte du coût de fonctionnement est importante car il représente les charges générées annuellement (achat de paille, carburant, charges de main-d’œuvre…).  Un équilibre est donc à trouver entre économies d’investissement et de fonctionnement. Rechercher l’économie d’investissement à tout prix peut avoir des conséquences négatives sur les coûts de fonctionnement par la suite.

Les modes de logements ont un impact direct sur ces coûts d’investissements et de fonctionnement mais aussi des conséquences différentes sur les conditions de travail et de vie des animaux. C’est le cas, par exemple, des systèmes de logement sur aire paillée moins coûteux à la construction que des systèmes logettes tout lisier mais qui ont un coût d’usage bien plus important. Aujourd’hui, le coût d’investissement dans un bâtiment VL neuf avec une aire paillée et un système de traite compris varie entre 5500 à 6500€ par place de vaches laitières. Il oscille entre 6500 et 7500€ la place pour un système de couchage en logettes.

La modélisation de plusieurs projets est un moyen de comparer les conséquences techniques et les coûts de fonctionnement et d’investissement des différents bâtiments modélisés. La réalisation de devis auprès des professionnels du bâtiment est incontournable pour essayer d’approcher au plus juste le coût de construction du bâtiment. L’auto-construction permet de réduire les coûts de construction, mais il faut être vigilant à ne pas négliger le suivi de l’élevage pendant le temps des travaux.

 

Raisonner son investissement : une étape incontournable

L’importance du poids financier que représentent de manière durable les bâtiments sur l’exploitation et sur le revenu de l’éleveur, ainsi que le lien entre choix techniques et performances zootechniques, imposent une réflexion économique autour du projet bâtiment, de sa conception à son utilisation.

En système bovin lait, les études « Coûts de production » réalisées sur le département de la Loire montrent que ces dernières années, l’amortissement moyen bâtiment est de 33€/1000 litres de lait vendus. Afin de ne pas fragiliser l’ensemble de l’exploitation, le projet de construction d’un bâtiment d’élevage ne doit pas générer en tenant compte des amortissements déjà existant plus de 65€/1000l d’amortissements bâtiment. Les charges liées au fonctionnement du bâtiment (entretien, paille, eau, électricité) sont supérieures de 8 à 10 €/1000 litres pour des élevages avec une traite robotisée. Connaissant le volume de lait à produire, le montant et la durée d’amortissement du bâtiment à réaliser ainsi que la charge d’amortissement des bâtiments existant, cette référence nous donne une bonne indication sur le budget global qu’il est possible d’allouer au projet bâtiment.

Lors de la réflexion d’un investissement bâtiment, il est nécessaire d’établir des priorités car l’exploitation ne s’arrête pas de fonctionner et elle supporte des annuités en cours et en projette certainement d’autres. De manière générale, les amortissements matériel et bâtiment ne doivent pas excéder 110€/1000l de lait vendus. Les annuités se situeront en dessous de 85€/1000l afin de ne pas fragiliser l’exploitation.

Un bâtiment d’élevage est un outil de production de longue durée, mais il représente également l’image de l’exploitation et de l’élevage avec un lien au territoire marqué par son intégration paysagère. C’est pour cela qu’un projet bâtiment et sa projection économique nécessitent une réflexion approfondie. L’accompagnement d’un conseiller indépendant vous permettra de définir au mieux votre projet en fonction de vos objectifs. Il vous aidera à formaliser vos idées afin d’échanger avec vos associés sur le fonctionnement du bâtiment d’élevage et à vous projeter dans plusieurs types de bâtiments avant de débuter la construction.

 

Amélie Bonthoux, Conseillère bâtiment Loire Conseil Elevage

Tags: